Le feuilleton de Chat Control est loin d'être terminé.
Donné pour enterré par ses opposants, le projet de règlement européen visant à surveiller les communications privées refait surface, poussé par un Danemark déterminé à trouver un compromis coûte que coûte.
Ce rebondissement intervient alors qu'il y a quelques semaines à peine, le 10 octobre, le projet semblait avoir reçu un coup d'arrêt fatal. L'Allemagne avait en effet officiellement annoncé son intention de voter contre, un veto qui privait le texte de la majorité qualifiée nécessaire à son adoption. Ce blocage, salué comme une victoire majeure par les défenseurs de la vie privée, plaçait la proposition dans une impasse politique... qui n'aura finalement pas duré.
Rappel : de quoi parle-t-on exactement avec ce projet ?
Derrière le nom de code "Chat Control", ou CSAR, se cache une proposition de la Commission européenne datant de 2022. L'objectif affiché est noble : lutter plus efficacement contre la diffusion de contenus pédopornographiques (CSAM).
Pour y parvenir, le texte obligerait les fournisseurs de services en ligne, y compris les messageries populaires comme WhatsApp ou Signal, à scanner les communications de leurs utilisateurs. Cette obligation de détection s'appliquerait même aux conversations protégées par le chiffrement de bout en bout, ce qui constitue le principal, et explosif, point de friction.
Pourquoi une telle levée de boucliers ?
La proposition a immédiatement provoqué une vague d'opposition massive. Pour les défenseurs des libertés numériques, imposer un scan des messages privés reviendrait tout simplement à dynamiter le principe même du secret des correspondances.
Ils y voient une porte ouverte à une surveillance de masse généralisée, un scénario jugé inacceptable dans une démocratie. De nombreuses organisations de la société civile, des experts en cybersécurité, mais aussi des géants de la tech comme Meta ou Signal ont tiré la sonnette d'alarme. Signal a même menacé de quitter le marché européen si le texte venait à être adopté en l'état. Plusieurs États membres, l'Allemagne en tête, ont exprimé leur refus catégorique.
Quel est l'avenir du texte au sein de l'UE ?
Le projet est actuellement dans une véritable impasse. Malgré les tentatives de la présidence danoise de l'UE pour proposer un nouveau compromis, le consensus est encore très loin d'être atteint. Des discussions bilatérales sont en cours pour tenter de convaincre les pays les plus récalcitrants comme l'Allemagne, la Pologne ou la Slovénie.
Si une rumeur persistante évoquait un vote en décembre, l'agenda officiel n'est toujours pas confirmé. La fracture est profonde entre les pays qui, comme l'Espagne, soutiennent une ligne dure pour protéger les victimes, et ceux qui estiment que la protection de la vie privée est une ligne rouge absolument infranchissable.