C'était l'un des derniers coups d'éclat de l'administration Biden en matière de régulation de secteurs high-tech stratégiques avant l'arrivée de Donald Trump au pouvoir.
Mi-janvier, une semaine avant l'investiture de Donald Trump, le gouvernement sortant a instauré une règle des tiers pour l'exportation des composants IA, un point essentiel pour conserver l'avance technologique des Etats-Unis.
Elle divise le monde en trois :
- les pays proches (18 nations, dont la France) qui ont un accès large aux puces de Nvidia, AMD ou Intel, les Etats-Unis conservant la priorité sur les volumes
- les pays neutres avec accès limité aux puces (en fonction de la puissance de calcul) et font l'objet d'un cadre réglementaire plus strict et de droits de douane renforcés
- les pays hostiles pour lesquels l'accès aux puces IA des USA est bloqué
Cette segmentation vise aussi à restreindre les contournements des embargos par des pays commandant de grands volumes de composants IA pour les redistribuer discrètement aux pays dans le viseur des Etats-Unis, comme la Chine.
Des négociations au cas par cas plutôt qu'une règle des tiers
Si le gouvernement de Donald Trump détricote bon nombre de décisions de son prédécesseur, il reste en phase avec les mesures d'embargo et de restriction d'accès aux puces pour des questions de sécurité nationale...sauf pour cette règle des tiers.
Selon Reuters, il réfléchirait à modifier cette disposition en annulant le découpage en tiers pour le remplacer par des accords de gouvernement à gouvernement. Il s'agirait en somme de reproduire le même schéma que pour les droits de douane réciproques, avec des négociations au cas par cas.
Cette méthode peut aider à cibler plus spécifiquement un pays soupçonné d'alimenter un marché gris ou noir des accélérateurs IA et GPU utilisés dans les centres de données de pays hostiles mais c'est aussi un bon moyen de pression pour obtenir des accords commerciaux avantageux en mettant en balance l'accès aux composants IA.
Diviser pour mieux régner ?
A l'heure où Donald Trump chamboule totalement la grille de lecture commerciale des Etats-Unis pour en créer une nouvelle en rompant les alliances établies, la fourniture de ces composants est un argument fort.
Et en négociant au cas par cas, il devient plus difficile de voir émerger des groupements de pays voulant résister ou s'opposer. L'Europe aura par exemple du mal à faire bloc et à proposer une réponse commune si les accords se font de pays à pays.
Donald Trump, Elon Musk et d'autres membres du gouvernement n'ont pas ménagé leurs déclarations depuis janvier pour tenter de diviser l'Europe et casser la cohésion.
Le sujet de l'abandon de la règle des tiers est toujours en discussion mais il avait fait l'objet de critiques pour son inefficacité envers certains pays problématiques et face à la crainte de voir les pays les plus contraints se mettre à utiliser des composants IA d'origine chinoise.