200 000 : c'est le nombre estimé de chiroptères qui périssent chaque année en Allemagne à cause des parcs éoliens. Longtemps, on a cru à une fatalité, un simple manque de chance pour ces animaux évoluant dans l'obscurité.
Mais une nouvelle étude, menée notamment par le Muséum national d'Histoire naturelle, vient de prouver le contraire. Les turbines ne sont pas juste des obstacles passifs plantés dans le paysage ; elles attirent activement ces mammifères via leurs signalisations nocturnes, créant un piège écologique redoutable.
Pourquoi ces structures fascinent-elles autant les animaux ?
Cela peut sembler contre-intuitif pour des animaux réputés pour leur sonar infaillible. Pourtant, les recherches montrent une attraction nette vers les mâts des éoliennes. Plusieurs facteurs expliquent ce comportement suicidaire : la confusion acoustique avec de grands arbres (lieux de repos ou de reproduction), la présence d'insectes eux-mêmes attirés par la structure, ou une simple curiosité.
Les espèces de haut vol, comme les noctules, se retrouvent happées dans la zone de rotation des pales. Ces précieuses chauves-souris, essentielles à la régulation des populations d'insectes, sont victimes de leur propre instinct, trompées par des infrastructures humaines qui modifient leur perception de l'environnement nocturne.
Quel est le rôle exact de l'éclairage dans ce carnage ?
Pour comprendre ce phénomène, les chercheurs ont analysé 28 000 enregistrements acoustiques sur différents sites. Les lumières rouges, installées au sommet des nacelles pour la sécurité aérienne, agissent comme des aimants. Lorsqu'elles sont allumées en continu, l'activité des animaux autour des turbines explose.
À l'inverse, dès que ces signaux lumineux sont éteints, l'activité retombe à un niveau normal, similaire à celui observé dans la nature sans infrastructure. C'est donc bien la pollution lumineuse générée par ce balisage aéronautique qui est le facteur clé de cette hécatombe. Une découverte majeure qui ouvre la voie à une solution technique relativement simple à mettre en œuvre.
La France est-elle prête à adopter la solution miracle ?
La réponse technique existe et porte un nom : le "balisage circonstancié". Le principe est d'allumer les feux uniquement lorsqu'un aéronef est détecté à proximité via un transpondeur, laissant le ciel obscur le reste du temps. Cette méthode élimine presque totalement les risques de collisions mortelles tout en assurant la sécurité des avions.
Si l'Allemagne a déjà rendu ce dispositif obligatoire, la France traîne des pieds. Le blocage n'est pas technologique mais administratif et militaire. Le ministère des Armées refuse pour l'instant d'équiper tous ses appareils de transpondeurs pour des raisons de sécurité nationale, empêchant de facto la généralisation de ce système. En attendant, les lumières restent allumées, et la biodiversité continue de payer le prix fort.
Foire Aux Questions (FAQ)
Pourquoi les chauves-souris s'approchent-elles des éoliennes ?
Elles sont attirées par plusieurs facteurs : la lumière rouge du balisage, les insectes qui s'y accumulent, et les turbulences de l'air qu'elles peuvent confondre avec la présence de grands arbres, leurs habitats naturels.
Qu'est-ce que le balisage circonstancié ?
C'est un système intelligent qui maintient les éoliennes dans le noir la majeure partie du temps et n'active les feux de signalisation que lorsqu'un avion ou un hélicoptère est détecté à proximité immédiate du parc éolien.
Pourquoi cette solution n'est-elle pas appliquée en France ?
Le déploiement est bloqué car le système repose sur la détection des transpondeurs des avions. Or, les avions militaires français ne sont pas tous équipés de ces dispositifs ou ne les activent pas toujours pour des raisons de confidentialité opérationnelle.