Depuis 2019, les Etats-Unis imposent un embargo commercial à la Chine sur la production et les techniques de gravure fine de puces électroniques. Le groupe Huawei a été particulièrement visé par les mesures : il ne peut pas faire produire ses puces chez les grands fondeurs ni acquérir les équipements permettant une gravure fine.

Mais la firme a de la ressource, en plus de disposer de sociétés-écrans lui permettant de passer au travers des mailles du filet des restrictions. Petit à petit, et aidée du fondeur chinois SMIC, elle développe ses propres techniques certes moins avancées mais tout de même très utiles quand l'accès aux puces occidentales lui est barré.

Tandis que Jensen Huang, dirigeant de Nvidia, part en visite en Chine pour tenter de rester sur cet immense marché et se prépare à créer des composants respectant les contraintes de puissance imposées par son gouvernement, la crainte de voir la Chine gagner son indépendance et se passer des puces occidentales commence à prendre corps.

Huawei bâtit ses propres usines de puces

Le Financial Times révèle que Huawei est en train de bâtir des sites de production de puces à Shenzhen, la grande ville industrielle chinoise où se construisent une majorité de produits électroniques.

Des images satellites montrent la construction de trois grandes lignes de production bâties dans le district de Guanlan où se situe le quartier général de Huawei et dont la firme aurait le contrôle direct.

Selon des indiscrétions sur place, ces usines bâtiront des processeurs pour smartphones et des accélérateurs IA Huawei Ascend concurrents des composants de Nvidia.

Le cauchemar de Jensen Huang serait en train de se réaliser alors que circulent des rumeurs de développements de puces Ascend aussi puissantes que ses propres accélérateurs IA.

Certes, en ne pouvant pas accéder aux dernières techniques de gravure fine, les puces de Huawei sont sans doute moins efficientes mais dans un pays comme la Chine, ce n'est pas forcément un problème et c'est toujours mieux que de ne pas disposer de puces du tout.

Et malgré tout, Huawei avance sur les techniques de gravure. L'entreprise aurait désormais une alternative aux équipements de lithographie EUV (Extreme Ultra Violet) du néerlandais ASML qu'elle ne peut pas importer, ce qui pourra lui permettre de descendre sous le noeud 7 nm qui constitue actuellement la limite avec les équipements dont elle dispose.

En route vers l'indépendance

La Chine reste en retard par rapport aux techniques les plus avancées mais elle n'est pas complètement bloquée comme l'espéraient les Etats-Unis et elle peut compter sur son immense marché interne pour compenser ses faiblesses.

De leur côté, Nvidia comme AMD auront du mal à trouver des débouchés pour leurs puces ailleurs qu'en Chine. Les composants les plus puissants sont absorbés par le marché US de l'IA tant que celui-ci est en croissance mais cela ne durera qu'un temps et les complications apportées par l'administration Trump avec son obsession pour les droits de douane ne facilitent pas les choses.

Le blocage des exportations d'accélérateurs IA Nvidia H20 pourrait être aussitôt remplacé par le lancement du composant Ascend 910C aux performances proches, ce qui constituerait un avertissement très sérieux pour l'industrie high-tech américaine.

La production se fera sans doute avec des rendements faibles et hors des logiques économiques ayant cours en Occident mais l'intérêt est ailleurs : lever ce moyen de pression et donner à la Chine une indépendance lui permettant de se passer des technologies venues de l'Ouest.

Source : Financial Times