Intel accélère sur son futur nœud de gravure 14A (équivalent 1,4 nm), changeant de stratégie par rapport au 18A jusqu'à présent au centre de sa nouvelle stratégie fonderie.
Le géant implique des clients externes comme Nvidia dès la conception. Au programme : un processeur Xeon custom pour les serveurs et l'intégration de puces graphiques RTX dans les SoC pour PC portables, un pari qui pourrait redéfinir le marché mais pèsera sur les finances.
Lors de la récente conférence RBC Capital Markets, John Pitzer, vice-président d'Intel, a levé le voile sur la stratégie ambitieuse de l'entreprise. Au cœur des discussions : le futur nœud de gravure 14A et le partenariat stratégique noué avec Nvidia.
Cette annonce dessine les contours d'un Intel qui cherche à reconquérir sa position de leader, non seulement pour ses propres produits, mais aussi comme fondeur de premier plan.
Pourquoi le 14A corrige les erreurs du 18A ?
La principale révélation concerne l'approche adoptée pour le développement du nœud 14A, une stratégie radicalement différente de celle du procédé Intel 18A. John Pitzer a admis que le 18A avait été principalement défini et optimisé pour les produits internes d'Intel (Panther Lake, Clearwater Forest), n'sollicitant que tardivement les retours des partenaires potentiels. C'est une rupture nette.
Intel Panther Lake en Intel 18A
Pour le 14A, la démarche est inversée. Intel est déjà en phase de discussion avec des acteurs majeurs, impliquant ses clients externes bien plus tôt dans le processus.
Cette collaboration précoce permet d'affiner la technologie en fonction des besoins réels du marché et d'améliorer significativement la maturité des kits de développement de processus (PDK).
Technologiquement, le 14A s'appuiera sur des versions de deuxième génération des transistors Gate-All-Around (GAA) et de l'alimentation par l'arrière (backside power delivery), promettant des performances et des rendements bien supérieurs à ceux du 18A au même stade de développement.
Une collaboration à deux visages avec NVIDIA
Le partenariat avec NVIDIA se matérialise sur deux volets distincts, touchant à la fois les data centers et le marché grand public. D'une part, l'accord prévoit la fabrication par Intel d'un processeur Xeon custom pour le compte de NVIDIA.
Ce dernier intégrera la technologie NVLink Fusion, offrant pour la première fois aux cœurs x86 d'Intel un accès à l'interconnexion à haute bande passante de NVIDIA, une capacité également partagée avec les plateformes Arm Neoverse.
D'autre part, et c'est peut-être l'aspect le plus visible pour les consommateurs, Intel intégrera des puces graphiques RTX directement dans ses futurs System-on-Chip (SoC) pour ordinateurs portables. Les clients (OEM) paieront NVIDIA pour la tuile graphique, et Intel se chargera de l'intégration complète.
Cette synergie vise à créer une nouvelle classe de PC portables très performants, ciblant d'abord le haut de gamme avant une potentielle démocratisation.
Un succès attendu, mais à quel prix ?
Ces ambitions ont un coût. Orienter le nœud 14A vers les clients externes signifie qu'Intel devra être prêt à monter en puissance sa capacité de production si la demande se confirme.
Cependant, ces dépenses d'investissement considérables seront nécessaires bien avant que les revenus ne se matérialisent. John Pitzer a ainsi prévenu que le succès commercial du 14A repousserait probablement le point d'équilibre financier de la division fonderie (Intel Foundry Services) à après la fin de l'année 2027.
Le vice-président estime toutefois que les investisseurs accepteront ce délai, car il serait la preuve tangible que la stratégie de fonderie externe d'Intel fonctionne. Cette stratégie, bien que coûteuse, est un test grandeur nature pour Intel Foundry.
Reste à voir si la matérialisation de ces contrats clients confirmera la capacité d'Intel à rivaliser durablement avec les géants comme TSMC et Samsung, et si le marché des PC portables haut de gamme répondra présent à cette nouvelle proposition de valeur.