Depuis la prise de participation de 10 % du gouvernement américain chez Intel à l’été 2025, la course au redressement s’accélère. Le géant américain, autrefois synonyme de leadership dans les semi-conducteurs, joue son avenir en cherchant le soutien de poids lourds comme Apple et TSMC, face à une industrie qui se réinvente autour de l’intelligence artificielle et des logiques de sécurité nationale.
La démarche soulève cependant des questions capitales sur les équilibres technologiques mondiaux et les stratégies des gouvernements, ainsi que plus directement sur l'avenir à court et moyen terme de la firme de Santa Clara, au creux de la vague faute d'avoir profité de l'essor de l'IA mais en pleine négociation de multiples contrats et alliances.
Vers une alliance inédite entre Intel, Apple, et TSMC ?
Le rapprochement d’Intel avec Apple et TSMC, révélé par le Wall Street Journal, marque une tentative de retour en force jamais vue dans le secteur des puces. « Intel a approché le géant taïwanais et la marque à la pomme pour des investissements ou des partenariats ».
L'entreprise cherche à sécuriser des fonds et des clients majeurs capables de dynamiser le nouvel Intel. Derrière cette opération se cache l’urgence d’un renouveau stratégique après une série de revers face à Nvidia et AMD, aujourd’hui leaders dans les technologies de calcul intensif pour l’IA.
L'initiative s’inscrit dans l’ambition de Lip-Bu Tan, le nouveau CEO depuis quelques mois, de repositionner Intel au centre du jeu, en s'appuyant sur des acteurs qui dictent la tendance du marché.
Apple, déjà cliente de TSMC, est vue comme le partenaire incontournable pour crédibiliser le projet, tandis que le fondeur taiwanais contrôle plus de 90 % des techniques de gravure avancées (nœuds sous N3), ce qui rend leur soutien à Intel stratégique mais reste soumis à des débats internes et des risques de fuite technologique.
Un interventionisme américain qui redistribue toutes les cartes
L’entrée de l’État américain au capital d’Intel change la donne. Ce « coup de théâtre » vise à soutenir l’industrie nationale face aux turbulences du secteur. De son côté, le secrétaire au Commerce Howard Lutnick et les équipes de la Maison Blanche agissent en coulisse pour encourager les géants technologiques à miser sur Intel.
Cette montée au capital public fait écho aux précédents historiques, comme l’investissement de Microsoft chez Apple dans les années 1990, et cherche à préserver la souveraineté américaine dans un domaine jugé stratégique pour la sécurité et la défense.
Cela permet d'envoyer un signal fort aux investisseurs et partenaires étrangers tout en créant un nouvel équilibre entre le privé et le public pour booster la capacité d’innovation et la résilience industrielle.
TSMC : Entre tentation, inquiétudes et rôle de sauveur implicite
Le fondeur taiwanais TSMC se trouve face à un dilemme. Les rumeurs de prise de participation ou de partenariat avec Intel soulèvent des préoccupations sur la potentielle « fuite technologique » vers les États-Unis.
La société, toujours à la pointe grâce à l’explosion de la demande en puces pour l’IA, a réaffirmé son refus d’acquérir ou de prendre une part directe dans les usines Intel, essentiellement pour préserver son avance.
Pour les analystes du cabinet d'études TrendForce, « La croissance de TSMC repose sur sa supériorité technique et la sécurité de ses secrets industriels ».
De plus, tout rapprochement serait scruté par Washington en raison des dossiers sensibles de défense et de sécurité nationale où Intel est impliqué. Il en résulte une collaboration envisagée comme « nécessaire mais risquée », qui pourrait bénéficier à TSMC en renforçant sa position face aux régulateurs américains, tout en maintenant son statut de leader mondial, indique encore le Wall Street Journal.
Un nouveau modèle pour Intel ? Scénarios d'avenir et réactions du secteur
À travers son projet de fonderie à la demande et la mise au point de nouveaux procédés comme le 18A et le futur 14A, Intel espère séduire des clients prêts à délaisser TSMC.
Pourtant, l’efficacité et la capacité industrielle restent en question. Les discussions avec TSMC et Apple pourraient infléchir la tendance, mais les analystes restent prudents.
Certains estiment que la solution la plus réaliste pour Intel serait de se recentrer sur la conception de puces et de céder une partie de ses capacités de production, au lieu d’affronter frontalement TSMC sur le terrain industriel.
Le secteur attend les prochaines étapes : test crucial du procédé de gravure Intel 14A dès 2026, sorties de nouveaux produits utilisant à la fois des savoir-faire internes et externes, et évolution du modèle économique vers une coopération plus ouverte.