La rivalité technologique entre les États-Unis et la Chine connaît un nouveau tournant. Pékin, pressé par les restrictions américaines en matière de semi-conducteurs, renforce son pari sur l’autonomie industrielle.
Résultat : les actions des fabricants locaux de puces IA s’envolent, les projets de nouvelles générations de processeurs se multiplient et certains noms comme Cambricon ou SMIC reviennent au premier plan. Le marché attend désormais de voir si ces avancées permettront réellement au pays de combler son retard sur les mastodontes étrangers.
Une envolée des valeurs boursières chinoises
Depuis quelques jours, les investisseurs se ruent sur les sociétés locales actives dans le secteur des semi-conducteurs. L’entreprise Cambricon, considérée comme la référence nationale sur le terrain des processeurs d’intelligence artificielle, a vu son action bondir de près de 20 %.
Cette hausse est portée par la perspective d’une demande accrue pour les solutions maison, dans un contexte où les géants étrangers comme Nvidia ou Intel sont vus avec méfiance par le gouvernement chinois comme une potentielle menace pour la sécurité nationale.
D’autres groupes avaient déjà profité de cette impulsion. Le fondeur SMIC, souvent décrit comme l’espoir technologique chinois capable de produire des circuits proches de la gravure en 7 nm, attire de plus en plus l’attention.
Pour les marchés, il s’agit du signe que Pékin pourrait s’approcher de sa stratégie de “découplage” technologique et centrer son développement autour de champions nationaux.
Cambricon, le pari des processeurs maison
Cambricon symbolise le désir d’indépendance technologique. Elle conçoit des unités de traitement spécialisées pour l’IA, capables de concurrencer sur certains usages les GPU occidentaux.
Ses processeurs équipent déjà des serveurs dans plusieurs centres de données chinois et bénéficient d’un soutien accru de la part des autorités. L’annonce de ses nouvelles puces a immédiatement renforcé la confiance des investisseurs.
Pour le gouvernement, ces produits s’inscrivent dans le cadre du programme “Made in China 2025”, qui vise à réduire la dépendance du pays aux chaînes d’approvisionnement étrangères.
Comme l’explique un analyste interrogé par Bloomberg, “ces avancées concrétisent l’idée que la Chine peut bâtir une industrie soutenable dans les semi-conducteurs, même sans les technologies américaines les plus avancées.”
Biren et DeepSeek, de nouveaux outsiders ambitieux
Au-delà de Cambricon, d’autres noms commencent à émerger. Le concepteur Biren, qui développe des puces graphiques hautes performances, espère se positionner comme une alternative à Nvidia pour l’entraînement des modèles d’intelligence artificielle.
Cet enthousiame autour des acteurs chinois s'explique par le fait que le dernier modèle d'IA chinois DeepSeek V3.1 suggère qu'il est animé au moins en partie par des composants IA d'origine chinoise.
De tels projets montrent que l’écosystème chinois n’est pas limité à un seul acteur. Des sociétés de design, de gravure et de packaging travaillent main dans la main pour combler les manquements actuels. Cette approche intégrée pourrait offrir à Pékin une meilleure résilience face aux contraintes extérieures...et mettre l'américain Nvidia et ses GPU IA au second plan.
Des incertitudes toujours présentes
Si les avancées récentes sont prometteuses, de nombreux défis restent à surmonter. Le retard accumulé face aux technologies de gravure les plus fines, la dépendance partielle à des équipements étrangers et la difficulté de créer un écosystème logiciel aussi robuste que celui de Nvidia constituent des obstacles réels. Les analystes estiment que les progrès seront mesurés sur plusieurs années, et non instantanés.
Néanmoins, le pari chinois galvanise les investisseurs et interpelle les observateurs géopolitiques. L’avenir dira si ces efforts permettront de réduire significativement la dépendance extérieure ou si les contraintes internationales actives continueront de brider les ambitions de Pékin.
Vers une nouvelle ère des semi-conducteurs ?
Ce qui s’esquisse avec l’envolée de Cambricon et la montée en puissance de Biren ou de SMIC, c’est la possibilité d’assister à une redéfinition des équilibres mondiaux sur le marché des semi-conducteurs.
Si la Chine confirme ses avancées, l’impact pourrait être majeur, tant pour l’industrie technologique que pour les relations internationales. Si la Chine arrive à imposer ses propres standards IA sur son marché mais aussi ailleurs (Afrique, Amérique du Sud, Europe...) avec des modèles d'IA pas forcément les plus puissants mais offrant un excellent rapport qualité / prix, comme c'est déjà le cas de DeepSeek, les Etats-Unis ont du souci à se faire alors que les coûts de leurs meilleurs modèles explosent.