C'est officiel. Le 11 décembre, la Chine a confirmé le succès du vol inaugural de son drone géant, le Jiutian. L'essai, mené dans la province du Shaanxi, marque une étape majeure pour l'Aviation Industry Corporation of China (AVIC). Cet appareil, dont le nom signifie "Neuf Cieux", n'est pas un drone comme les autres : c'est un véritable porte-drones aérien, conçu pour changer la face des conflits futurs.

Quelles sont les capacités de ce "porte-avions volant" ?

Le Jiutian impose par ses dimensions : 25 mètres d'envergure, 16 tonnes de masse maximale au décollage et une capacité d'emport de 6 tonnes. Son autonomie annoncée de 7 000 kilomètres le place au niveau des drones de surveillance longue endurance comme le MQ-9 Reaper américain. Mais sa véritable spécificité réside ailleurs. Sous ses ailes, huit points d'emport lui permettent d'emporter des missiles, des bombes guidées ou des munitions rôdeuses.

Le concept central est celui de "vaisseau-mère". L'appareil est doté d'un module interne en "ruche" ou structure alvéolaire, capable de stocker et de larguer un essaim de près de cent drones miniatures. Cette capacité de déploiement massif fait de ce grand drone une plateforme de saturation, dont l'objectif est de submerger les défenses anti-aériennes adverses par le nombre.

Quelle est la doctrine militaire derrière le Jiutian ?

Avec cet engin, la Chine illustre un basculement doctrinal majeur. Le Jiutian n'est plus seulement un effecteur, mais un nœud tactique mobile. L'idée est d'amener au plus près de la zone d'opération une capacité de projection multiple. En combinant portée, altitude et emport, ce porte-drones devient un multiplicateur de force, capable de lancer simultanément des missions de renseignement, de guerre électronique ou des frappes cinétiques via son essaim.

Jiutian porte-drones chine

Ce principe, comparable à celui des poupées gigognes, permet de fragmenter les chaînes de détection et d'engagement de l'adversaire. Une défense conçue pour traiter des menaces isolées se retrouve soudainement face à des dizaines de cibles aux trajectoires variées, saturant ses capteurs et ses systèmes d'armes. C'est la concrétisation de la guerre par saturation, où la masse prend le pas sur la sophistication d'une menace unique.

Quelles sont les implications pour les armées occidentales ?

Ce premier vol est un message politique et stratégique envoyé aux États-Unis et à leurs alliés. Il accélère une course industrielle et doctrinale déjà bien engagée dans le domaine des systèmes sans pilote. Cependant, le Jiutian n'est pas sans failles. Sa taille imposante constitue sa principale vulnérabilité : son manque de furtivité en fait une cible de haute valeur, facilement repérable par les radars modernes.

Jiutian 02

La réponse occidentale devra donc être systémique. Elle implique de développer en priorité des capacités de lutte anti-essaims, combinant des moyens cinétiques à haute cadence, de la guerre électronique pour brouiller les communications du groupe, et des armes à énergie dirigée. La détection, elle aussi, doit devenir distribuée et collaborative pour suivre et contrer ce type d'attaque de saturation à longue portée avant que le vaisseau-mère n'ait pu larguer sa charge.

Jiutian

Foire Aux Questions (FAQ)

Le drone Jiutian est-il uniquement militaire ?

Non. Les communiqués officiels chinois insistent sur sa dualité d'emploi. Des usages civils sont mis en avant, comme la livraison de marchandises lourdes dans des zones isolées, le secours d'urgence en cas de catastrophe ou encore la cartographie et la surveillance pour des missions de protection de l'environnement.

Quelle est la principale faiblesse du Jiutian ?

Sa taille. Avec 25 mètres d'envergure, il est aussi grand qu'un avion-cargo militaire. Ce gigantisme le rend très visible aux radars modernes et donc particulièrement vulnérable face à des défenses aériennes performantes. Il n'est absolument pas un aéronef furtif.

Qu'est-ce qu'une "attaque par saturation" ?

Il s'agit d'une tactique militaire visant à submerger les défenses d'un adversaire en le confrontant à un nombre de menaces simultanées bien supérieur à sa capacité de traitement. L'objectif est de s'assurer que même si une partie des attaquants est interceptée, un nombre suffisant atteindra la cible pour la détruire.