Le conflit entre Meta et les autorités européennes atteint un nouveau sommet. Devant la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE), la maison mère de Facebook et Instagram a vivement critiqué les méthodes d'investigation de la Commission européenne. En cause, des demandes de documents jugées excessives et intrusives, posant une question cruciale sur l'équilibre entre la régulation antitrust et le respect des droits fondamentaux.

Quelles sont les accusations précises de Meta ?

L'avocat de Meta, Daniel Jowell, a exposé des exemples particulièrement choquants devant les juges pour illustrer son propos. Il a révélé que les filets des enquêteurs européens avaient permis de saisir des documents sans aucun lien apparent avec l'affaire, touchant à l'intimité la plus profonde des employés et de leurs familles. Le groupe dénonce une pratique de collecte de données qui va bien au-delà du cadre professionnel.

Parmi les fichiers collectés figuraient des rapports d'autopsie de proches, des bulletins scolaires d'enfants ou encore des informations détaillées sur la sécurité personnelle de certains salariés. Pour l'entreprise, ces requêtes qualifiées d'« aberrantes » n'auraient jamais dû être formulées, car elles outrepassent largement le cadre des enquêtes antitrust.

Comment la Commission européenne justifie-t-elle ses méthodes ?

La dispute technique se cristallise autour des mots-clés utilisés pour filtrer les millions de documents internes de l'entreprise. Meta soutient que la Commission a imposé une liste démesurée : près de 2 500 termes de recherche pour le dossier sur les données et 600 pour celui sur Marketplace, forçant la production d'un volume de données colossal de près d'un million de documents.

La défense de l'UE, assurée par l'avocat Giuseppe Conte, rejette fermement ces allégations. Il affirme que le nombre de mots-clés se compte en centaines et non en milliers, et que la Commission a en grande partie repris des termes proposés par Meta elle-même dans une procédure antérieure. Il a rappelé qu'il s'agissait d'une « pratique courante » pour toutes les autorités de la concurrence dans le monde.

Quel est l'enjeu de cette confrontation judiciaire ?

Ce bras de fer judiciaire, qui remonte à des investigations lancées il y a quatre ans, s'inscrit dans un contexte déjà tendu. L'an passé, Meta a été condamnée à une amende de 798 millions d'euros pour avoir lié son service de petites annonces, Facebook Marketplace, à son réseau social principal. Cette pratique a été jugée comme imposant des conditions commerciales déloyales aux concurrents.

Au-delà du cas spécifique de Meta, la décision de la CJUE, attendue pour 2026, est absolument capitale. Elle devra déterminer si le pouvoir d'investigation de la Commission européenne est effectivement sans limites ou s'il doit être strictement encadré par les principes de nécessité, de proportionnalité et, surtout, par le droit fondamental à la vie privée des citoyens européens. C'est tout l'équilibre des pouvoirs qui est en jeu.

Source : Reuters