Face à la prise de contrôle du fabricant de puces Nexperia par le gouvernement néerlandais, la Chine accuse La Haye de blocage et menace d'aggraver les perturbations sur la chaîne d'approvisionnement.

L'industrie automobile européenne, dépendante de ces composants essentiels, se retrouve au cœur d'une crise géopolitique qui pourrait paralyser ses lignes de production.

Le ministère chinois du Commerce a publiquement accusé le gouvernement néerlandais de ne pas coopérer pour trouver une issue à la crise Nexperia, avertissant que cette posture risquait d'envenimer davantage la situation. Cette déclaration jette un froid sur les espoirs d'une résolution rapide, alors que les usines européennes sont déjà sous pression.

Retour sur une prise de contrôle sous haute tension

Pour comprendre l'impasse actuelle, il faut remonter au 30 septembre dernier. Ce jour-là, le gouvernement néerlandais a activé une loi datant de la guerre froide pour prendre le contrôle du fabricant de semi-conducteurs Nexperia.

Bien que basée aux Pays-Bas, l'entreprise est la propriété du géant chinois Wingtech Technology, une situation qui a nourri des inquiétudes croissantes à La Haye comme à Washington.

La crainte principale était de voir la propriété intellectuelle et des technologies de pointe être transférées en Chine. Des documents judiciaires néerlandais ont d'ailleurs révélé que les États-Unis avaient exercé une pression considérable, menaçant de placer Nexperia sur une liste noire si sa direction chinoise n'était pas écartée.

Pékin réplique et l'Europe retient son souffle

La réponse de Pékin ne s'est pas fait attendre. En guise de représailles, la Chine a imposé des restrictions à l'exportation des produits Nexperia assemblés sur son territoire.

C'est là que le bât blesse : si la plupart des puces sont fabriquées en Europe, environ 70 % d'entre elles sont ensuite conditionnées et testées en Chine avant leur distribution mondiale. Cette dépendance a brutalement exposé la fragilité de la chaîne d'approvisionnement européenne.

L'alerte a été rapidement sonnée par les plus grands noms du secteur. Volkswagen, Honda et Nissan ont prévenu qu'un blocage prolongé pourrait stopper net leurs lignes de production.

L'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA) a même averti que certaines usines n'étaient plus qu'à "quelques jours" d'un arrêt forcé, faute de ces composants vitaux utilisés partout, des airbags aux systèmes de verrouillage centralisé.

Un dialogue de sourds aux enjeux planétaires ?

Le dialogue diplomatique semble aujourd'hui dans une impasse. D'un côté, Pékin appelle les Pays-Bas à "cesser d'interférer" et à adopter une approche "constructive".

De l'autre, le ministère néerlandais des Affaires économiques assure que les pourparlers se poursuivent avec les autorités chinoises et les partenaires internationaux. Une réponse mesurée qui peine à masquer la profondeur du désaccord.

Malgré des déclarations se voulant rassurantes de la part de la Maison-Blanche et de responsables européens suite à des discussions entre Donald Trump et Xi Jinping, la sortie officielle du ministère chinois prouve que Pékin n'est pas prêt à lâcher du lest.

Plusieurs contentieux demeurent, notamment la suspension de l'ancien PDG de Nexperia et la volonté de la filiale chinoise de l'entreprise d'affirmer son indépendance, complexifiant encore la recherche d'une solution durable.

La résolution de cette crise est donc loin d'être acquise. Alors que les constructeurs automobiles européens cherchent en urgence des exemptions pour continuer à s'approvisionner, l'affaire Nexperia démontre avec force à quel point la guerre technologique mondiale peut avoir des répercussions très concrètes sur l'économie et l'industrie du Vieux Continent.