Un rapport de l'inspecteur général du Pentagone conclut que le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, a enfreint les protocoles en utilisant l'application Signal pour discuter de frappes au Yémen.
En partageant des informations jugées classifiées, il aurait mis en péril la sécurité des troupes, malgré sa capacité à déclassifier des données. Une affaire qui fragilise sa position.
Un protocole de sécurité bafoué au plus haut niveau
L’affaire trouve son origine au début de l'année 2025, lorsque l’administration Trump a lancé une campagne militaire contre les rebelles houthistes au Yémen. Les discussions stratégiques sur ces opérations se sont tenues, entre autres, sur un groupe de discussion de l'application Signal, auquel participaient plusieurs hauts responsables de la sécurité nationale.
Le scandale a éclaté quand Mike Waltz, alors conseiller à la sécurité nationale, a ajouté par erreur un journaliste du magazine The Atlantic à cette conversation hautement sensible, dévoilant une brèche de sécurité béante au sommet de l'État.
Le rapport de l'inspecteur général, dont les conclusions ont fuité dans la presse américaine, vient confirmer la gravité des faits. Il établit que Pete Hegseth a partagé des informations militaires sensibles, incluant les heures précises des frappes et les équipements utilisés, sur l'application Signal.
Ce faisant, il a violé les politiques de son propre ministère, qui interdit formellement l'usage de plateformes commerciales non sécurisées pour la transmission d'informations classifiées, mettant potentiellement en danger les pilotes et les objectifs de la mission.
Le rapport du Pentagone, entre accusation et paradoxe
Selon plusieurs sources ayant consulté le document, l'enquête a déterminé que les informations partagées par le ministre étaient bien classifiées au niveau « secret » au moment où il les a reçues.
Le rapport du Pentagone est formel : l'utilisation d'un téléphone personnel pour communiquer de tels détails représente une violation claire des règlements militaires et aurait pu compromettre la sécurité des troupes si les données avaient été interceptées par une puissance adverse.
Pete Hegseth testant le logiciel de pilotage à distance d'hélicoptères
Toutefois, l'affaire se heurte à une subtilité juridique de taille. En tant que secrétaire à la Défense, Pete Hegseth détient « l'autorité originelle de classification » et a donc le pouvoir de déclassifier des informations de sa propre initiative.
C'est sur cet argument que la Maison Blanche et le ministre lui-même s'appuient pour clamer une « exonération totale » et conclure que l'affaire est close. Le rapport ne précise cependant pas si Hegseth a suivi les procédures adéquates pour une telle déclassification, laissant planer le doute sur la légalité de sa démarche et sur les raisons l'ayant poussé à agir ainsi.
Quelles conséquences pour un ministre déjà contesté ?
Au-delà de la bataille juridique, l'implacable réalité est que cette affaire écorne sérieusement l'image de la rigueur militaire. Au sein des forces armées, elle risque de nourrir le sentiment d'un « deux poids, deux mesures », où les règles qui s'appliquent strictement au personnel de rang inférieur seraient ignorées au sommet de la hiérarchie.
Un tel manquement à la discipline opérationnelle, de la part de son plus haut dirigeant, pourrait avoir des effets délétères sur le moral des troupes et la crédibilité américaine auprès de ses alliés internationaux.
Ces révélations surviennent au pire moment pour Pete Hegseth, déjà dans la tourmente pour d'autres raisons. Il est notamment critiqué pour la gestion de frappes controversées dans les Caraïbes, menées dans le cadre d'une prétendue lutte contre le narcotrafic.
Une de ces opérations, au cours de laquelle une seconde salve aurait été tirée pour éliminer des survivants, a suscité l'indignation et des accusations de crime de guerre.
Ce nouveau rapport sur le Signalgate ne fait qu'ajouter du poids aux critiques qui remettent en question son jugement et sa capacité à diriger la plus puissante armée du monde.