Longtemps considérés comme un sanctuaire d'observation, les abords de la Terre sont devenus un véritable embouteillage cosmique. La baisse drastique des coûts de lancement, largement initiée par des acteurs comme SpaceX, a provoqué une explosion du nombre de satellites.

Nous sommes passés de 5 000 en 2019 à plus de 15 000 aujourd'hui, et les projections évoquent un chiffre vertigineux de 560 000 engins d'ici dix ans. Ces immenses constellations de satellites, bien que connectant le monde, dressent un voile de plus en plus opaque entre nous et l'univers.

Une pollution lumineuse d'un nouveau genre

Une étude récente menée par des chercheurs de la NASA et publiée dans la revue Nature quantifie pour la première fois l'ampleur de la menace. Loin d'être de simples points lumineux, les satellites reflètent la lumière du Soleil, de la Lune et même de la Terre, créant une pollution lumineuse parasite.

Comme l'explique Alejandro Borlaff, scientifique à la tête de l'étude, ces interférences ne font pas que gâcher une belle image de nébuleuse ; elles effacent des données scientifiques cruciales en masquant les signaux extrêmement faibles que les télescopes spatiaux s'efforcent de capter.

Un espace terrestre proche déjà très garni de constellations diverses

Les chiffres annoncés par les simulations sont particulièrement alarmants. Alors que les contaminations d'images de Hubble étaient de 4,3 % entre 2018 et 2021, ce taux pourrait grimper à près de 40 % d'ici 2035.

Pour d'autres observatoires au champ de vision plus large, comme le futur télescope chinois Xuntian, la situation vire au cauchemar : jusqu'à 92 traînées pourraient zébrer chaque cliché. Ce qui n'était qu'un photobomb occasionnel est en train de devenir une véritable crise pour l'astronomie orbitale.

Derrière les traînées, un risque scientifique majeur

L'impact de ces traînées de satellites va bien au-delà de la simple obstruction visuelle. C'est un risque majeur pour des pans entiers de la recherche scientifique.

La détection d'une exoplanète, par exemple, repose souvent sur la mesure de l'infime baisse de luminosité d'une étoile lorsque la planète passe devant. Une traînée lumineuse peut complètement masquer ce signal, nous privant de découvertes fondamentales sur les mondes qui nous entourent.

Un enfer lumineux pour les télescopes spatiaux

Le problème devient encore plus critique lorsqu'il s'agit de sécurité planétaire. Les traces laissées par les satellites sont visuellement identiques à celles d'astéroïdes passant à proximité de la Terre.

Dans un ciel saturé de ces fausses alertes, le risque de manquer un véritable géocroiseur est démultiplié. Les réseaux comme Starlink et ses futurs concurrents posent ainsi un défi inédit à nos systèmes de surveillance des astéroïdes potentiellement dangereux.

Quelles solutions face à un ciel saturé ?

Les scientifiques cherchent activement des parades, mais chaque piste révèle de nouvelles complications. Rendre les satellites plus sombres pour qu'ils réfléchissent moins la lumière semble logique, mais cela augmente leur température.

En conséquence, ils émettent davantage de rayonnement infrarouge, déplaçant simplement le problème d'une longueur d'onde à une autre. Ces fausses bonnes idées montrent la complexité du défi technique à relever.

La seule solution viable semble résider dans une coordination sans précédent entre les agences spatiales, les astronomes et les opérateurs de satellites. Des propositions émergent, comme confiner les constellations à des orbites plus basses que celles des télescopes.

Cependant, l'industrie spatiale avance bien plus vite que la réglementation. La fenêtre d'action se referme rapidement, et chaque mois de retard rend le problème exponentiellement plus difficile à résoudre avant que le ciel ne soit définitivement encombré.