Le monde de la tech n’en revient pas. Lip-Bu Tan, patron d’Intel, a reconnu publiquement que son entreprise, longtemps leader incontesté des puces, n’est même plus dans le top 10 mondial.
Un aveu rare, presque choquant, qui marque la fin d’une époque. La société, qui a dominé le marché des microprocesseurs pendant des décennies, doit aujourd’hui faire face à des rivaux asiatiques survoltés et à la vague de l’intelligence artificielle.
En parallèle, Intel annonce des milliers de suppressions de postes, signe que la tempête est loin d’être passée. Comment expliquer cette chute ? Et surtout, y a-t-il un espoir de rebond ?
Intel hors du top 10 : un séisme pour l’industrie
La déclaration du CEO d’Intel a fait l’effet d’une déflagration dans la Silicon Valley. L’entreprise, autrefois symbole de puissance et d’innovation, voit sa capitalisation et ses parts de marché fondre face à des géants comme TSMC, Samsung ou Nvidia.
Le classement des leaders mondiaux du semi-conducteur ne compte plus Intel parmi les dix premiers (le Top 3 est composé de Nvidia, Samsung et TSMC), une première dans l’histoire récente du secteur.
Cette rétrogradation n’est pas qu’un détail d’ego : elle reflète une perte d’influence majeure, alors que les investissements massifs se concentrent désormais sur l’intelligence artificielle et les nouvelles architectures de puces.
La révolution de l’IA laisse Intel sur le carreau
Pourquoi Intel décroche-t-il ? La réponse tient surtout en un mot : IA. Alors que la demande explose pour les puces capables d’alimenter les modèles d’intelligence artificielle, Intel peine à rivaliser avec Nvidia ou AMD, qui raflent les contrats les plus lucratifs.
Composant IA Intel Gaudi : trop tard pour profiter de l'essor de l'IA ?
Lip-Bu Tan l’admet sans détour : « Il est trop tard pour rattraper la concurrence sur l’IA ». Les retards accumulés dans le développement de nouvelles technologies, les choix stratégiques discutables et la difficulté à attirer les talents ont accéléré la chute.
Intel multiplie les plans sociaux, ferme des sites et tente de réorienter sa stratégie, désormais tournée vers la fonderie pour autrui mais avec toujours des défis importants : proposer une technique de gravure attractive et trouver de gros clients pour faire tourner les sites de production.
Licenciements massifs et pari sur l’avenir
Face à la crise, Intel n’a pas d’autre choix que de se séparer des activtés non stratégiques et tailler dans ses effectifs : plusieurs milliers de postes supprimés à travers le monde, des fermetures d’usines et une réorganisation profonde.
Il faut réduire les coûts, pousser sa propre stratégie hors IA tout en surveillant des opportunités inédites sur ce segment et tenter de retrouver une place sur l’échiquier mondial.
Mais la route s’annonce longue. Les investisseurs s’interrogent : Intel peut-il vraiment se réinventer ? Ou assiste-t-on à la fin d’une légende de la tech ?
La stratégie "5 noeuds en 4 ans" du prédécesseur Pat Gelsinger est toujours d'actualité pour rebondir mais elle perd en vigueur : après avoir décidé de sauter le noeud Intel 20A, la firme envisagerait de se passer aussi de l'Intel 18A (en dehors de ses propres productions de puces) pour tout miser sur l'Intel 14A (équivalent 1,4 nm) et capter des clients pour ses services IFS (Intel Foundry Services).
Une stratégie sur le fil du rasoir qui ne tolérera plus aucune erreur et qui est aussi une course contre la montre face à la concurrence, à la fois gourmande en ressources et financement mais qui ne délivrera ses premiers revenus que sur la fin de la décennie.
Pendant ce temps, Nvidia, qui a eu la "chance" (selon Pat Geslinger) de flairer le filon de l'IA au bon moment, flirte avec les 4000 milliards de dollars de valorisation boursière quand Intel ne pèse plus que...100 milliards de dollars.