Depuis 2019, les Etats-Unis imposent des restrictions commerciales pour empêcher les entreprises chinoises d'accéder à certaines technologies d'origine US qui pourraient être détournées ou utilisées à des fins militaires.

Cela concerne notamment le secteur des semi-conducteurs et la production de puces et composants électroniques. Les tentatives d'acquisition d'entreprises américaines ou de transfert de technologies par des firmes chinoises sont découragées, l'accès aux grands fondeurs à la pointe des technologies de gravure est bloqué et même les équipements de production de puces font l'objet d'une surveillance spécifique.

Cela n'a pas empêché Huawei d'annoncer un processeur mobile gravé en 7 nm chez le fondeur SMIC fin 2023 dans ses smartphones de la série Mate 60, sans produit à partir de technologies et d'équipements d'origine américaine, ce qui conduit actuellement les Etats-Unis à renforcer les mailles de leur embargo.

Et ce d'autant plus que SMIC laisse déjà entendre être en mesure de lancer bientôt une production en 5 nm tout en préparant une bascule vers le 3 nm plus tard. Difficile pourtant de différencier la provocation de la réalité.

L'embargo ne suffit pas

Si les équipements de pointe sont interdits d'exportation depuis les premières restrictions, les interdictions se sont étendues aux équipements de génération plus ancienne.

Pour autant, la Chine a acheté en masse des composants et des équipements avant la mise en place des restrictions renforcées, ce qui lui permet d'avoir environ un an et demi d'autonomie avant de risquer un déclassement.

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Dans le même temps, le pays, tout comme la Russie, tente toujours de récupérer les équipements d'occasion que peuvent revendre les grands producteurs de puces pour densifier leur propre production sur des noeuds matures ou les utiliser pour leurs pièces détachées et entretenir l'outil de production même sans l'aide occidentale.

Cette situation tend à agacer les USA qui sont en train de mettre la pression sur les gouvernements des pays possédant de grands équipementiers et producteurs de puces pour refermer toutes les possibilités d'équipement en parallèle.

Les équipementiers coréens ne revendent plus leurs vieilles machines

C'est à tel point que les entreprises coréennes Samsung Foundry et SK Hynix feraient désormais le choix de stocker leurs anciens outils de production plutôt que de les revendre, rapporte le Financial Times.

Ces entreprises craignent de voir ces équipements récupérés par la Chine ou la Russie et déclencher des représailles des Etats-Unis contre leur gouvernement. Le stockage des anciens équipements aurait commencé dès 2022 qui, sans cela, aurait sans doute été acquis par des entreprises majoritairement chinoises pour les réutiliser...ou parfois pour les revendre de son côté à la Russie.

Ces ressources de seconde main deviennent ainsi stratégiques à l'heure où les USA resserrent le maillage des restrictions et elles pourraient conduire à mécontenter les autorités américaines si elles étaient éparpillées sans contrôle.

Renforcer les restrictions, répartir l'industrie électronique sur plus de pays

Selon le Financial Times, les Etats-Unis veulent agir sur plusieurs fronts en ajoutant de nouvelles entreprises chinoises à leur liste noire mais aussi en cherchant à déconcentrer l'industrie de production des puces dont l'activité est étoitement associée à un petit nombre de pays, au premier rang desquels Taiwan, que la Chine veut rattacher à son territoire national.

Les USA poussent ainsi à l'étalement de l'industrie électronique dans toute l'Asie du Sud-Est grâce à des investissements stratégiques. En cas de conflit ouvert, il sera beaucoup plus difficile de stopper ou de prendre le contrôle de la production mondiale de puces si elle n'est pas limitée à un petit nombre de pays.

Source : Financial Times