Le supercalculateur Jupiter, développé par Eviden pour EuroHPC, a officiellement franchi la barre symbolique de l'exaflop. Installé en Allemagne, il devient le quatrième système public au monde et le premier en Europe à atteindre ce niveau de performance, se plaçant juste derrière les géants américains dans le dernier classement Top500.
Dans la dernière version de ce classement de novembre 2025, qui fait office de baromètre mondial pour les machines de calcul haute performance (HPC), l'Europe a marqué les esprits.
Le système Jupiter, hébergé au centre de calcul de Jülich en Allemagne, a validé sa place dans le club très fermé des machines capables de dépasser le million de milliards d'opérations en virgule flottante par seconde.
Un colosse de silicium aux ambitions continentales
Conçu par Eviden, la branche spécialisée du groupe Atos, Jupiter n'est pas un nouveau venu. Ses premières performances partielles en juin l'avaient déjà couronné comme le supercalculateur le plus puissant d'Europe.
Mais le passage à l'échelle supérieure était l'objectif ultime. Grâce à sa partition "Booster" équipée de près de 24 000 superpuces Nvidia Grace-Hopper GH200, il a atteint 1 exaflop sur le benchmark de référence High-Performance Linpack (HPL).
Cette performance le classe désormais au quatrième rang mondial, juste derrière les trois mastodontes américains : El Capitan, toujours leader du Top500, Frontier et Aurora.
C'est le premier système public non américain à revendiquer un tel statut, même si l'on soupçonne la Chine de posséder plusieurs machines similaires sans toutefois les soumettre à ce classement international.
Plus qu'une simple course à la puissance brute ?
Le benchmark HPL, bien qu'historique, ne dit pas tout des capacités réelles d'une machine. D'autres tests, comme le High Performance Conjugate Gradients (HPCG) ou le HPL-MxP (précision mixte), révèlent des nuances importantes.
Sur ces benchmarks alternatifs, qui simulent des applications plus proches du monde réel ou des usages en intelligence artificielle, la hiérarchie peut être bousculée.
Par exemple, El Capitan, leader incontesté sur HPL, n'obtient "que" 17,41 petaflops sur HPCG, à peine plus que le système japonais Fugaku, pourtant bien moins puissant sur le papier.
Jupiter, de son côté, s'illustre bien sur le HPL-MxP avec 6,25 exaflops, confirmant sa polyvalence pour les calculs scientifiques qui mélangent différentes précisions pour gagner en vitesse.
Une machine encore en construction
Le plus impressionnant est que Jupiter n'a pas encore atteint son plein potentiel. Les performances actuelles ne proviennent que de sa partition "Booster" basée sur des GPU. Une seconde partie, le "Universal Cluster", est toujours en cours de développement et devrait être mise en service l'année prochaine.
Ce cluster universel reposera sur des processeurs européens, les Rhea1 du concepteur français SiPearl, basés sur une architecture Arm. Bien que moins puissants pour le calcul brut que les GPU, ces CPU apportent une flexibilité essentielle pour les logiciels non optimisés pour les architectures graphiques.
Avec l'ajout de cette section, Jupiter pourrait encore grappiller quelques petaflops et potentiellement dépasser Aurora, l'actuel numéro trois mondial, si aucune autre machine ne vient jouer les trouble-fêtes d'ici là.