Le feuilleton de l'AI Act continue. Fin septembre, Bruxelles envisageait un report pour les règles les plus strictes (concernant les IA "à haut risque") face à un double obstacle : des normes techniques qui n'étaient pas prêtes et une pression intense de l'industrie et de certains États membres (Pologne, Suède) craignant un frein à l'innovation.
Aujourd'hui, ce qui n'était qu'une rumeur est devenu un projet concret. La Commission européenne s'apprête bien à reporter plusieurs dispositions clés de sa législation pionnière. Mais la raison principale a changé : la pression n'est plus seulement interne, elle est désormais ouvertement américaine et géopolitique.
Pourquoi l'Union européenne recule-t-elle ?
La raison tient en un mot : pression. Officiellement, l'UE reste engagée envers sa législation. Mais en coulisses, les critiques fusent de toutes parts, et l'influence de la Maison Blanche et des poids lourds du numérique semble porter ses fruits.
Elles proviennent des géants technologiques américains, mais aussi de nombreuses entreprises européennes qui estiment que la complexité de l'AI Act pénalise avant tout l'innovation locale et consolide la domination des mastodontes américains.
La Maison Blanche a enfoncé le clou, qualifiant la démarche européenne de pratique anticoncurrentielle, tandis que Donald Trump a même évoqué de possibles représailles commerciales si l'Europe ne revoyait pas sa copie.
Quelles sont les mesures concrètes qui pourraient être reportées ?
Un paquet de simplification, attendu pour le 19 novembre, devrait introduire des retards de mise en œuvre ciblés pour alléger la charge administrative.
Confirmant les craintes de septembre, l'une des pistes principales serait d'accorder une période de grâce d'un an aux entreprises utilisant des systèmes d'IA à haut risque. Cet aménagement crucial vise à leur laisser le temps de s'adapter sans freiner leur développement.
De même, les lourdes amendes prévues en cas de non-respect des obligations de transparence, l'un des piliers du texte, pourraient être repoussées à août 2027.
Une décision avant tout géopolitique
Ce potentiel revirement dépasse largement le cadre technologique. Entré en vigueur en août 2024, l'AI Act se voulait le fer de lance d'une régulation mondiale. Aujourd'hui, la Commission européenne semble surtout vouloir éviter de provoquer Washington dans un climat international déjà particulièrement tendu.
Les menaces épisodiques de Donald Trump, que ce soit sur le soutien militaire à l'Ukraine ou sur le fragile accord commercial transatlantique, pèsent lourd dans la balance et poussent l'Europe à la prudence.
En signe d'apaisement, la création d'un bureau IA centralisé au niveau européen est également envisagée pour simplifier la gouvernance, montrant une volonté d'assouplir les contraintes initiales.