L’annonce de la réintégration de centaines de fonctionnaires fédéraux jetés dehors lors du plan de réduction mené par le DOGE sous l’administration Trump marque un retournement qui interroge sur l’efficacité réelle de ces coupes.

Derrière la volonté d’optimiser les dépenses publiques, ce revirement soulève autant de questions qu’il révèle de failles dans la gestion de la General Services Administration (GSA), organe clé de la logistique étatique américaine.

Cette problématique a déjà été mise en avant dans certaines critiques de représentants de l'administration Trump qui suggèrent qu'Elon Musk, à la tête du DOGE en début d'année, s'est trop focalisé sur la réduction du nombre de fonctionnaires.

Retour des employés : que s'est-il passé ?

Au printemps, le plan de suppression de postes orchestré par le DOGE (Department of Government Efficiency), alors dirigé par Elon Musk, avait frappé de plein fouet la GSA.

Près de 79% du staff au siège, 65% des gestionnaires de portefeuille et 35% des responsables de sites ont vu leur contrat s’arrêter. Au même moment, l’agence recevait l’ordre d’annuler des centaines de baux immobiliers fédéraux et de vendre une partie importante de ses infrastructures.

Ces mesures visaient, officiellement, à faire des économies et à lutter contre les abus. Elles ont entraîné le renvoi de centaines de fonctionnaires chargés de la gestion des services publics et certaines voix regrettaient alors la perte d'experts dans leur secteur et l'absence d'alternatives pour les remplacer, même si la stratégie semble avoir été de vouloir les remplacer par de l'intelligence artificielle.

Après plusieurs mois de chambardements dans l'organisation de la fonction publique américaine, plus de 400 membres du personnel sont aujourd’hui conviés à reprendre leur poste avant la mi-octobre.

Cette soudaine remobilisation intervient alors que le DOGE avait annoncé avoir sauvé près de 460 millions de dollars grâce à la résiliation des baux. Ce chiffre est depuis révisé à seulement 140 millions, selon Chad Becker, ancien expert immobilier fédéral, qui constate : « L’agence s’est retrouvée cassée et sous-dotée, sans le personnel nécessaire pour maintenir les fonctions de base ».

Des économies contestées et leur impact réel

Les premières justifications du ministère spécial de réduction des coûts reposaient sur une lutte contre les coûts superflus et une optimisation « musclée » des ressources publiques.

Or, le recentrage opéré aujourd’hui par la GSA n’a pas démontré le bénéfice attendu. Les organisations syndicales, élus de l’opposition et propriétaires de biens publics dénoncent un processus qui, selon eux, aurait engendré davantage de frais que d’économies.

Cela concerne des frais supplémentaires imposés aux contribuables pour des propriétés finalement non évacuées en temps voulu mais aussi des contentieux juridiques ouverts par divers groupes de pression et propriétaires impactés.

Greg Stanton, représentant démocrate, critique ouvertement ces mesures : « Cela a créé une confusion coûteuse tout en sapant les services sur lesquels les citoyens comptent réellement ».

L’administration Trump, de son côté, reste discrète sur les chiffres précis des coûts engendrés et assure vouloir agir « dans le meilleur intérêt des agences clientes et des contribuables ».

Un retour en arrière généralisé dans plusieurs agences américaines

Outre la GSA, le National Park Service, le Labor Department, l’Internal Revenue Service (IRS) ou encore le ministère de l’Agriculture ont également commencé à rappeler leur personnel licencié ou ayant accepté des offres de départ anticipé. L’IRS a indiqué que la réduction des effectifs avait compromis la gestion de certaines missions critiques, incitant à la réintégration partielle.

Des agences comme la National Weather Service ont même engagé de nouveaux collaborateurs afin de pallier les manques issus des départs. Cette série d’embauches accrues souligne l’impréparation des coupes et leur impact direct sur la continuité des services publics fédéraux.

D’autres institutions, à l’instar de la gestion de la sécurité nationale, ont eu à réembaucher des experts techniques pour faire face à des besoins urgents.

Les effets sur les services publics et la confiance des citoyens

Les licenciements massifs ont eu des effets perceptibles sur la gestion courante et l'accès aux services fédéraux. Plusieurs bâtiments n’ont pas été évacués dans les délais, générant des pénalités et des incertitudes pour de nombreux acteurs du secteur immobilier. 

En appuyant sur la pertinence des arbitrages opérés à Washington, le débat sur la véritable efficience budgétaire en devient inévitable. Pour nombre de citoyens, la valse des annonces et contre-annonces alimente la défiance envers la gestion gouvernementale et la transparence des processus de recrutement, d’autant plus que certains fonctionnaires en attente de clarification sur le maintien de leur poste touchent un salaire sans avoir exercé leur mission.

Quelles perspectives pour l’avenir de la fonction publique américaine ?

Alors que plus de 480 baux fédéraux ont été épargnés du plan de résiliation initial, la GSA s’active à reconstituer ses équipes et organise le transfert et la réaffectation de ses effectifs pour relancer une activité normale.

Les questions de gouvernance, la réorganisation interne et la gestion future des propriétés fédérales émergent comme des enjeux majeurs pour limiter les perturbations. Le Government Accountability Office mène actuellement une enquête pour éclaircir la gestion de ces mesures.

Ce retour en arrière du gouvernement américain invite à une réflexion plus globale sur la nécessité d’une réforme administrative pensée sur le long terme, et non dans l’urgence. La transition observée pourrait augurer de nouveaux modèles d’organisation, plus adaptés aux besoins des citoyens et à la réalité de chaque agence.