Le président des Etats-Unis ne veut plus voir Lip-Bu Tan à la tête du groupe Intel et réclame sa démission immédiate. Cette requête inattendue s’appuie sur des inquiétudes quant à des conflits d’intérêts liés aux investissements importants de Tan dans des entreprises chinoises, certaines ayant des liens présumés avec l’armée populaire de libération.
Intel, acteur clé du secteur des semi-conducteurs aux États-Unis, se retrouve au cœur d’une controverse mêlant enjeux économiques, géopolitiques et sécuritaires, alors que l'entreprise est déjà en plein doute sur sa stratégie et les moyens d'atteindre ses objectifs.
Des liens controversés avec la Chine au cœur de la polémique
L’engagement de Lip-Bu Tan dans des centaines d’entreprises chinoises via sa société de capital-risque Walden International est au cœur des critiques. Selon des investigations récentes, il détiendrait des parts dans plus de 600 sociétés en Chine, dont une quinzaine avec des connexions directes à des entités militaires.
Cette situation a conduit le sénateur républicain américain Tom Cotton à interpeller le conseil d’administration d’Intel, soulignant que ces liens peuvent remettre en question la sécurité nationale, notamment dans le cadre des contrats stratégiques du groupe avec le Département de la Défense américain.
Le passé de Tan à la tête de Cadence Design Systems, entreprise ayant plaidé coupable pour avoir enfreint des contrôles d’exportation à destination d’institutions militaires chinoises, alimente aussi le scepticisme.
La réaction de Donald Trump : une position ferme et sans appel
Dans un message posté sur sa plateforme Truth Social, Donald Trump a qualifié Lip-Bu Tan de « hautement conflictuel » et a exigé sa démission immédiate, déclarant « Il n’y a pas d’autre solution à ce problème. » Cette prise de position a eu des répercussions immédiates, faisant chuter le cours de l’action Intel de près de 4% lors de la séance suivante.
Trump souligne ainsi les tensions croissantes entre les intérêts économiques américains et la nécessité de protéger les technologies stratégiques des influences étrangères, notamment chinoises. Sa demande résonne dans un contexte où les États-Unis cherchent à renforcer leur souveraineté technologique face à Pékin.
Intel face à un dilemme stratégique et géopolitique
Pour Intel, la nomination de Lip-Bu Tan à la tête du groupe s’inscrivait dans une volonté de renouvellement et d’expansion, grâce à son expérience étendue sur le marché asiatique et dans l’industrie des semi-conducteurs.
Cependant, cette controverse met en lumière les tensions entre une expertise internationale nécessaire pour prospérer et des impératifs sécuritaires stricts imposés par le gouvernement américain.
La société doit désormais naviguer entre ces exigences contradictoires tout en maintenant sa compétitivité technologique, notamment face au géant taïwanais TSMC. Des interrogations émergent quant à la capacité de Tan à concilier ces défis.
L'avenir d'Intel mal engagé
Cette affaire dépasse le simple cadre de la gouvernance d’entreprise. Elle révèle combien le secteur des semi-conducteurs est devenu un théâtre d’affrontement géopolitique majeur, où la sécurité nationale et les stratégies industrielles s’entremêlent.
Les décisions prises autour de la position de Lip-Bu Tan pourraient influencer la perception des investisseurs, la coopération avec les autorités américaines, ainsi que la capacité d’Intel à attirer et retenir des talents à l’échelle mondiale.
Le dirigeant d'Intel a été choisi car c'est un vétéran de l'industrie et un bon connaisseur des rouages d'Intel. Cette expertise a été jugée essentielle pour aider la firme à remonter la pente alors qu'elle affronte des vents contraires, entre baisse des ventes de processeurs, virage manqué de l'IA et difficultés pour faire émerger sa nouvelle division de fonderie IFS (Intel Foundry Services) grâce de nouvelles techniques de gravure.
Entre les retards et les obstacles techniques pour améliorer les rendements, Intel voit son avance se réduire et semble se préparer à abandonner les noeuds de gravure intermédiaires Intel 20A et Intel 18A pour se concentrer sur le procédé Intel 14A.
Mais il faut faire vite et trouver de gros clients capables de commander d'importants volumes de puces pour rentabiliser les lourds investissements. En se séparant de Pat Gelsinger, initiateur de la stratégie fonderie, pour choisir Lip-Bu Tan, la direction d'Intel espérait se doter d'un bon gestionnaire capable d'accélérer la transition du coeur d'activité. Elle risque de s'en mordre les doigts maintenant qu'elle est dans le collimateur de Donald Trump.