Le groupe Stellantis, né de la fusion entre PSA et Fiat Chrysler, a mis de côté son projet de conduite autonome de niveau 3. Cette décision s’inscrit dans une révision plus large de ses ambitions logicielles.

Alors que le secteur automobile mise massivement sur l’intelligence artificielle et les systèmes avancés d’aide à la conduite (ADAS), ce retrait crée la surprise et soulève de nombreuses interrogations sur la stratégie du constructeur.

Un arrêt confirmé du programme de niveau 3

Selon plusieurs sources industrielles rapportées par l'agence Reuters, Stellantis a décidé de suspendre ses travaux sur le système de conduite autonome AutoDrive de niveau 3.

Ce niveau correspond à une prise en charge presque complète de la conduite par le véhicule, avec une intervention minimale du conducteur. D’après les informations disponibles, ce projet ne figure plus parmi les priorités de la marque. Une source interne explique que l’entreprise a choisi de « revoir à la baisse ses objectifs logiciels » afin d’optimiser ses ressources.

Alors que des concurrents comme Mercedes et Tesla accélèrent dans le déploiement d’innovations similaires, ce retrait illustre une stratégie plus prudente de Stellantis face aux coûts et aux incertitudes technologiques.

Le système AutoDrive avait pourtant été présenté en février 2025 comme une solution d'aide à la conduite de niveau 3 jusqu'à 60 km/h puis de niveau 2 jusqu'à 95 km/h, "même de nuit et par conditions météorologiques dégradées".

La solution devait s'intégrer à d'autres systèmes (STLA Brain, STLA Smart Cockpit) et était typiquement pensée pour les trajets domicile-travail. Stellantis ne dévoilait cependant pas de date de disponibilité.

Des ambitions logicielles revues à la baisse

Ce choix ne concerne pas uniquement la conduite autonome. Il s’inscrit dans une redéfinition plus large de la stratégie numérique du groupe. Stellantis prévoyait initialement un développement ambitieux pour concurrencer les leaders de la voiture connectée. Mais les investissements massifs nécessaires et les retards accumulés ont poussé le constructeur à limiter ses ambitions.

L’entreprise a ainsi décidé de concentrer ses moyens sur des logiciels plus opérationnels, notamment pour la gestion des systèmes d’infodivertissement et l’amélioration des services connectés déjà proposés sur ses modèles. Le constructeur veut avancer de façon plus pragmatique sur des segments directement exploitables sans multiplier les projets à très haut risque technologique.

La conduite autonome, un défi financier et technique

Pour comprendre ce choix, il faut mesurer l’ampleur des défis liés au développement de la conduite autonome. Le passage au niveau 3 représente une rupture technologique en passant par des capteurs avancés, le traitement de volumes massifs de données en temps réel tout en étant devant évoluer dans un cadre réglementaire strict.

À ces difficultés s’ajoutent des coûts colossaux. Certaines estimations avancent que plusieurs milliards de dollars seraient nécessaires pour déployer et fiabiliser une telle technologie à grande échelle.

Dans ce contexte, Stellantis préfère prendre du recul. Comme l’explique un proche du dossier, « mieux vaut rationaliser les investissements et cibler des usages concrets, plutôt que se disperser sur un projet trop incertain ». Cette décision illustre la tension entre l’innovation rapide exigée par le marché et la réalité économique des constructeurs.

Ne pas s'emballer sur des technologies encore jeunes

Le retrait de Stellantis tranche avec les annonces répétées de ses rivaux. Mercedes a déjà obtenu des autorisations pour des systèmes de conduite automatisée de niveau 3 dans certains marchés.

Tesla, de son côté, continue de promouvoir son logiciel « Full Self Driving », bien que régulièrement critiqué pour ses limites et surveillé par les régulateurs. Face à ces géants, Stellantis fait le choix de temporiser.

La question reste donc ouverte : le groupe risque-t-il de perdre du terrain dans une course mondiale où chaque trimestre compte ? Ou, au contraire, adopte-t-il une posture plus réaliste, en attendant que le marché et les technologies arrivent à maturité ? Cette stratégie pourrait lui éviter des dépenses inutiles tout en lui laissant la possibilité de revenir dans la course au moment opportun, peut-être en se tournant vers des solutions externes ayant fait leurs preuves.

Les perspectives pour Stellantis et le marché

L’abandon du programme de conduite autonome de niveau 3 ne signifie pas un désintérêt total pour l’innovation logicielle. Stellantis continue de miser sur ses plateformes numériques et sur le développement de services embarqués.

L’entreprise pourrait également privilégier des partenariats avec des acteurs technologiques spécialisés afin d’intégrer, plus tard, des solutions avancées sans supporter seule l’intégralité des coûts.

Cette décision reflète un constat partagé par plusieurs acteurs : la véritable conduite autonome reste encore éloignée. Entre exigences réglementaires, acceptabilité sociale et faisabilité technique, l’arrivée de véhicules totalement autonomes sur nos routes prendra plus de temps que prévu.

Source : Reuters