Le constructeur Tesla soumet au vote de ses actionnaires un plan de rémunération historique pour Elon Musk, pouvant atteindre 1 000 milliards de dollars pour s'assurer de la présence du milliardaire sur le long terme et le laisser déployer sa stratégie.

Conditionné à des objectifs spectaculaires, il est vivement critiqué pour ses clauses jugées trop souples et suscite l'opposition de fonds de pension, qui craignent un précédent dangereux pour la gouvernance d'entreprise. Le vote s'annonce décisif.

Le constructeur de véhicules électriques se prépare pour une assemblée générale cruciale le 6 novembre prochain. Au cœur des débats : une proposition de rémunération pour son PDG qui défie l'entendement.

Ce plan colossal intervient après l'annulation en justice d'un précédent package de 55 milliards de dollars par une juge du Delaware, une décision qui avait poussé Tesla à déménager son siège social au Texas et à redoubler d'efforts pour s'assurer du soutien de ses actionnaires.

Des objectifs ambitieux, mais des failles béantes ?

Sur le papier, le plan est lié à des "Mars-shot milestones", des jalons stratosphériques. Pour débloquer les 12 tranches de sa rémunération, Elon Musk devrait porter la capitalisation boursière de Tesla à 8 500 milliards de dollars et atteindre des objectifs opérationnels audacieux, comme la vente de millions de robots Optimus. Cependant, une analyse détaillée révèle que certains de ces paliers seraient étonnamment faciles à atteindre.

Selon des experts, atteindre seulement deux des cibles les plus simples, combiné à une croissance modeste de l'action, pourrait déjà lui rapporter plus de 26 milliards de dollars.

Les objectifs de ventes de véhicules, par exemple, sont jugés particulièrement peu exigeants, demandant une moyenne de 1,2 million de voitures par an, soit moins que les ventes réalisées par Tesla en 2024. Cette flexibilité perçue alimente la méfiance d'une partie des investisseurs.

Fronde des investisseurs institutionnels : un signal d'alarme ?

Si Elon Musk peut compter sur une base de fans loyaux, une coalition de fonds de pension et de gestionnaires d'actifs monte au créneau pour dénoncer ce qu'ils considèrent comme une dérive.

Des figures comme le contrôleur de la ville de New York, Brad Lander, qualifient le projet de "trip mégalomaniaque" qui relève plus de "l'égo d'Elon" que de la santé financière de l'entreprise. L'inquiétude porte autant sur le montant que sur le précédent qu'il créerait en matière de gouvernance d'entreprise.

Le conseil d'administration, présidé par Robyn Denholm, est particulièrement visé, accusé de manquer d'indépendance et de ne pas parvenir à encadrer un dirigeant aux multiples casquettes (SpaceX, X, xAI...).

Les critiques soulignent que ce plan est une forme de "rançon" pour retenir un PDG qui a laissé entendre qu'il pourrait "poursuivre d'autres intérêts" sans une compensation adéquate pour son travail passé et futur.

Une campagne publicitaire pour convaincre les actionnaires

Fait rare pour une entreprise qui a longtemps boudé la publicité traditionnelle, Tesla a lancé une véritable campagne de communication pour rallier les votes. Des publicités ont été déployées sur les réseaux sociaux comme X (anciennement Twitter), Facebook et Reddit, mettant en scène le robot Optimus pour vanter les mérites du plan et inciter les actionnaires à voter "oui". Cette stratégie vise à mobiliser massivement les investisseurs particuliers, qui représentent environ 34 % de l'actionnariat.

Cette approche avait déjà porté ses fruits en 2024 lors du vote pour ratifier le précédent plan de paiement, approuvé à 72 %. Tesla semble donc réutiliser une recette qui a fait ses preuves, misant sur la fidélité de sa base pour contrer l'opposition structurée des grands fonds institutionnels.

Le résultat du vote du 6 novembre ne déterminera pas seulement l'avenir financier d'Elon Musk, mais enverra un message fort sur l'équilibre des pouvoirs au sein des plus grandes entreprises mondiales.