Le projet de fusion entre les groupes TF1 et M6, qui devait donner corps à un géant français de l'audiovisuel capable de résister aux géants du streaming, avait été annoncé en mai 2021 avec l'ambition de créer les synergie et de pouvoir peser plus lourd sur le marché, en collectant notamment plus de revenus publicitaires.

Mais créer une telle entité, outre les problématiques liées à la fusion des deux parties, induit de grosses difficultés en matière de régulation et d'impact sur le jeu de la concurrence.

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Assez vite, l'Autorité de la concurrence a fait valoir un certain nombre de points devant être pris en compte pour faire avancer le dossier afin de ne pas créer une trop grosse distorsion concurrentielle.

Trop de contraintes pour équilibrer le jeu de la concurrence

Plusieurs remèdes ont été évoqués, comme la vente des chaînes TFX et 6Ter à un groupe tiers (Altice s'était montré intéressé) pour respecter le cadre réglementaire, tandis qu'une troisième chaîne, Paris Première détenue par M6, aurait conduit à la restitution des fréquences TNT (tout en continuant d'être diffusée via d'autres canaux).

Cet ensemble de conditions imposées pour réaliser la fusion se sont révélées très lourdes, au point de mettre en péril la logique même d'un rapprochement. Dès cet été, des doutes ont surgi quant à la faisabilité du processus, les deux groupes indiquant ne pas vouloir la réaliser à n'importe prix ni condition.

De nouvelles auditions auprès de l'Autorité de la Concurrence ont eu lieu au début du mois de septembre, laissant un dernier espoir de trouver un terrain d'entente, mais le couperet est tombé : la fusion entre TF1 et M6 est abandonnée.

L'un des remèdes imposés, à savoir céder l'une des chaînes essentielles de l'un des deux groupes, soit TF1 d'un côté soit M6 de l'autre, a été l'exigence de trop, dans cette négociation déjà difficile.

Un avenir assez flou

La décision a sans doute été très difficile au regard des moyens déjà engagés et des objectifs poursuivis. Les deux groupes ont régulièrement utilisé l'argument de l'impératif d'une fusion sous peine de dépérir et de disparaître sous la pression des géants du Net.

Ils vont pourtant devoir, sauf nouveau rebondissement, jouer leur avenir en solo dans un contexte de plus en plus difficile, avec des plateformes américaines de diffusion vidéo qui tiennent le haut du pavé et transforment le paysage audiovisuel en profitant d'un statut d'acteur du Net plutôt que de TV et ainsi non soumis aux mêmes contraintes que les diffuseurs de chaînes de télévision.

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L'Autorité de la Concurernce elle-même souligne que "la publicité télévisée et la publicité en ligne [ne] sont [pas] substituables du point de vue des annonceurs. Dès lors, il n'apparaît pas justifié de les intégrer au sein d'un marché unique". C'était pourtant bien sur ce point que le rapprochement TF1 - M6 espérait jouer face aux plates-formes de vidéo à la demande, et plus encore avec l'apparition d'offres hybrides sur les grands fournisseurs de services de VOD avec des abonnements moins chers mais intégrant de la publicité.

L'abandon de la fusion entre TF1 et M6 va très vite avoir des conséquences, entre l'annulation de la cession des chaînes TFX et 6Ter à Altice et la suspension de la prise de participation du géant mort-né dans la plate-forme Salto de France Télévisions.

Générer de nouveaux revenus

Si chacun tente de faire bonne figure et se veut plus ou moins rassurant sur l'avenir, les perspectives s'annoncent compliquées. TF1 peut continuer de jouer sur ses atouts, même si un temps de vaches maigres est à prévoir avec des réductions de coûts à la clé.

Le problème de la rétribution de la diffusion de ses chaînes de télévision gratuites de la TNT, dont l'accord de renouvellement est refusé par le groupe Canal, va se poser avec encore plus d'acuité pour générer des revenus complémentaires. Les premières décisions après les requêtes auprès du tribunal de commerce

Chez M6, la situation sera encore plus tendue et pourrait nécessiter un plan d'action intense qui ne laissera pas le groupe de diffusion indemne, faute de pouvoir s'appuyer sur cette fameuse "logique industrielle" qui devait tout changer.