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Dr. Phil
FR3 20h55 - MULHOLLAND DRIVE en VF !

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lorenzo
Gromit wrote:

e rajoute que le rapport de dépendance se trouve aussi totalement
inversé puisque dans la réalité (exprimée par Diane à la soirée
anniversaire, deuxième partie), Diane "doit tout" et dépend
professionellement et socialement de Camilla qui, elle, a réussi. Dans
son rêve, Diane inverse ce lien puisque Camilla (devenue Rita),
amnésique et fragile, dépend entièrement de Diane (devenue Betty) et de
ses initiatives.



Mécanisme très classique en psychologie.

De plus, la caractéristique prédominante de Camilla
(être une actrice) disparaît complètement dans le rêve (la Camilla
actrice qui y apparaît est "autre", en fait la fille qui embrasse la
vraie Camilla à la partie d'anniversaire).



La Camilla blonde est très manifestement une "salope" pour Betty.
Quant à la Rita brune, elle prend son nom de l'affiche de Gilda. C'est
donc par ce biais une "actrice" mais elle est surtout mythe, du
personnage et de la star.

--
FK
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lorenzo
Gromit wrote:


Rien à dire sur tout le résumé, sauf... :
>
> Diane est une aspirante actrice. Elle vient du Canada, près de la
> frontière avec les USA (cf Twin Peaks). Elle est arrivée à Hollywood
> après avoir hérité de sa tante. Ce qui la fait espérer, c'est qu'elle
> est "douée" pour le spectacle, vu qu'elle a remporté un concours de
> danse (celui fantasmé dans la séquence pré-générique).
> En fait, différents indices font déjà douter de cette version. Il est
> possible par exemple que Diane ait été victime d'attouchements sexuels
> dans sa jeunesse de la part d'un parent (son oncle ? son grand père ?)
> et que l'héritage ait été la contre-partie du fait qu'elle ait accepté
> de garder le silence (cf le club Silencio, les petits vieux de
> l'aéroport qui deviennent figures maléfiques, le comportement de Diane
> elle-même qui reproduirait ce dont elle a été victime, "The Sylvia North
> Story", transposition d'un film existant sur une telle victime,
> "Sylvia", la scène jouée lors de l'audition où elle séduit "un grand ami
> du père", etc.)

J'aimerais que tu nous dises quels sont ces "différents indices" car je
n'en vois pas un seul (sauf à faire de la totale surinterprétation, mais
peut-être que beaucoup de choses m'ont échappé sur ce point).



Il y a beaucoup de faits relevés sur mulholland-drive.net qui
enrichissent vraiment les hypothèses. Même si les contributeurs ont
donné des avis personnels, il y a un certain accord sur cet aspect.

La façon dont Diane raconte son parcours, comme quoi c'est le concours
de jitterbug qu'elle a gagné qui lui a donné envie de tenter sa chance à
Hollywood, fait très téléphonée. Le jitterbug n'est plus dansé depuis
des décennies. La mère d'Adam Kesher fronce les sourcils parce qu'elle
n'y croit pas du tout mais ne le dira pas explicitement. Dans la scène
de danse du début (avec les couples rétro), on ne voit jamais Diane.
Elle est juste couronnée gagnante, entourée des deux petits vieux. Or,
c'est généralement un couple qui gagne un concours de danse... Donc ça
pourrait être du fantasme. Surtout que le plan sur elle et les petits
vieux vire aussitôt au flou puis au net, au flou... (une des deux fois
où Lynch utilise le procédé dans le film).

D'autre part, le coup du legs lié au silence suite à des attouchements
sexuels n'est jamais affirmé mais c'est une hypothèse plausible. Surtout
quand on a vu "Twin Peaks" (où on retrouvait un ventilateur que Palmer
coupe avant de coucher avec sa fille). Le film qui est censé être tourné
est "The Sylvia North Story" et il y a bien un film qui s'appelle
"Sylvia" sur le drame d'une jeune femme victime d'attouchements de la
part d'un de ses parents. Le nom complet de l'héroïne était Sylvia
West !

On peut donc tout à fait supposer que la somme léguée par cette tante
Ruth pourrait être de l'argent sale, entaché d'une transaction où le
silence de Diane aurait été acheté en échange de quelque chose
d'inavouable. Cette hypothèse est à mon avis renforcée par le fait que
Diane se décide aussi vite à consacrer l'argent à payer un crime.

Donc, je n'y verrais pas forcément le centre du film mais je crois que
l'arrière-plan du personnage de Diane est plus profond qu'il n'y paraît.

--
François Kahn
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lorenzo
protiv wrote:

Il me semble qu'il y a un oubli d'importance dans tout cela; celui du
caractère parodique, utilisant les ressorts des différents genres
cinématographiques hollywoodiens, de la partie fantasmée,
"reconstituée" par Diane alors que l'on est dans un moment tragique (ses
derniers instants de vie peu avant son suicide). Lynch réalise là un
véritable tour de force : il ne s'agit d'un simple spectacle fictif
auquel assite le spectateur mais d'une véritable manipulation dont il
est la principale "victime". Le désir mimétique c'est du bidon, tout
cela n'est qu'illusion. Quel pute ce Lynch!



Oubli, oubli... Je ne prétendais pas en parler. Je "résumais"
l'intrigue.

La morale du film pourrait être que Diane était peut-être une actrice
minable mais qu'elle aurait certainement fait une excellente scénariste
;-)

En tout cas, sur le plan des mécanismes de la création, c'est une
exploration passionnante et souvent jouissive.

--
FK
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protiv
Francois Kahn wrote:

protiv wrote:



Il me semble qu'il y a un oubli d'importance dans tout cela; celui du
caractère parodique, utilisant les ressorts des différents genres
cinématographiques hollywoodiens, de la partie fantasmée,
"reconstituée" par Diane alors que l'on est dans un moment tragique (ses
derniers instants de vie peu avant son suicide). Lynch réalise là un
véritable tour de force : il ne s'agit d'un simple spectacle fictif
auquel assite le spectateur mais d'une véritable manipulation dont il
est la principale "victime". Le désir mimétique c'est du bidon, tout
cela n'est qu'illusion. Quel pute ce Lynch!





Oubli, oubli... Je ne prétendais pas en parler. Je "résumais"
l'intrigue.





C'est une partie essentielle, centrale du film qui ne peut s'exclure
d'un résumé, sinon on fausse l'opinion que l'on peut en retirer. Les
éléments de la parodie sont au moins aussi importants que ceux qui
relèvent de l'histoire tragique proprement dite. Effectivement, on peut
penser qu'il y a une projection de Lynch lui-même dans le délire
fantasmatique de Diane. Une nouvelle piste à explorer peut-être?
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analogue
Christian Fauchier a écrit :
Pourcentage des 16 à 65 ans éprouvant des difficultés à lire et à
comprendre des textes de la vie quotidienne (enquête OCDE, 1995) :

Suède 7,5 ; Pays-Bas 10,5 ; Allemagne 14,4 ; Canada 16,6 ; États-Unis
20,7 ; France 40,1 ; Pologne 42,6.



Que veut dire votre sondage ? Que nous avons 40% d'illétrés ?

--
Laurent Raufaste
analogue @ http://www.glop.org/
Votez OUI !
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lorenzo
protiv wrote:


>Oubli, oubli... Je ne prétendais pas en parler. Je "résumais"
>l'intrigue.
>
>
>
C'est une partie essentielle, centrale du film qui ne peut s'exclure
d'un résumé, sinon on fausse l'opinion que l'on peut en retirer.



Ou plutôt un film comme celui-ci ne peut pas se résumer à son intrigue.
Là, je savais bien que je charcutais et que le traitement visuel est
sonore est certainement plus fort que l'histoire dans l'impression que
suscite le film mais mon intention était de proposer une explication
"plausible" pour ceux qui avaient déjà vu le film. L'intrigue est bien
plus cohérente que ce qu'on pourrait supposer.

Les
éléments de la parodie sont au moins aussi importants que ceux qui
relèvent de l'histoire tragique proprement dite. Effectivement, on peut
penser qu'il y a une projection de Lynch lui-même dans le délire
fantasmatique de Diane. Une nouvelle piste à explorer peut-être?



A vrai dire, je n'ai aucune curiosité concernant les faits de la vie de
Lynch qui auraient pu inspirer le film. Lynch s'imagine-t-il en Diane ou
en Diane qui se rêve elle-même en Betty, d'ailleurs ? ;-)

La parodie est en tout cas assurée par quelques éléments comme
l'itinéraire d'Adam Kesher (le caissier ? qui bouffe Casher ?) avec ses
mésaventures conjugales, une partie des trucs autour du cowboy et
surtout du tueur à gage maladroit. Pour l'audition de Betty, on est
plutôt dans la satire que la parodie. Le vieux beau bronzé aux U.V., le
réalisateur à la masse sont à la fois des éléments qui font partie du
concret peu glorieux d'Hollywood (un sous George Hamilton et un sous,
mettons Robert Benton) et qui participent également de la revanche
fantasmée de Diane (Bob Breckitt n'est d'après la fin pas le has been
montré au début mais le réalisateur prestigieux de "The Sylvia North
Story").

Toutefois, je crois malgré tout qu'on n'est pas essentiellement dans la
parodie ou dans le second degré, comme on pourrait avoir ça avec
Tarantino, à part les scènes du tueur à gages qu'on aurait pu retrouver
dans "Pulp Fiction". On est dans un univers de film noir pris avec un
certain sérieux : un monde où il n'y a pas d'issue possible. Et en même
temps, le film a bien conscience (à la différence de Diane "scénariste")
que cet univers, aussi attirant qu'il soit, est un univers de convention
et qu'on ne pourrait plus aujourd'hui faire un film "noir" pur et dur.

Quand je me suis intéressé il y a quelques mois aux collaborateurs d'Ed
Wood ou à tous ceux qui sont passés plus ou moins injustement à la
postérité pour des séries B hyper-ringardes, j'ai toujours trouvé un peu
la même histoire : des types (surtout de jeunes blondes assez mignonnes)
qui débarquaient tout droit de leur patelin où ils étaient la vedette et
qui sont convaincus d'être le prochain James Dean ou la prochaine
Marilyn Monroe. Et qu'Hollywood va leur ouvrir les bras.

Et deux ans après, tu les vois à peine en figurants dans une série B.
Ils sont des milliers à être dans ce cas. Les filles vont être MAW
"model/actress/whatever", ce qui en dit déjà assez long. Le whatever
implique alors de faire serveuse. Et parfois, quand ça ne marche pas, ça
va être le porno, la prostitution (au mieux, on se fait payer son loyer
par un "type sympa") ou pire : le retour dans son bled natal.

Le générique d'un Ed Wood est édifiant : il n'y a que des gens sur liste
noire ou incapables d'avoir mieux qu'une apparition non créditée dans
des séries B.

Là où Lynch a été subtil, c'est que si on est convaincu que Naomi Watts
(ou "Betty") peut être une excellente interprête lors de son audition,
on ne sait finalement rien sur le talent de Diane. On ne la voit pas
jouer ! Elle n'était peut-être pas nulle. Il y a tellement de gens qui
se plantent parce qu'ils n'ont pas d'agent à la hauteur ou de relations
haut placées. Dans ce sens, Lynch va plus loin que Wilder dans
"Boulevard du crépuscule" où on montrait que William Holden aurait pu
faire un très honnête scénariste (le projet qu'il a en parallèle avec la
copine de son meilleur ami).

Ça, en tout cas, c'est le genre d'éléments absents de Mulholland Dr. et
qui me font penser que ça n'est pas fondamentalement une parodie (ou une
satire). Démystification, oui (et en même temps célébration), parodie
non.

--
François Kahn
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nospam
Pierre Maurette wrote:

On peut donc en conclure que le suédois est une langue simple et
fruste, et que le polonais est horriblement complexe et abstrait ?



On peut se poser la question des causes de cet état de fait, ce qui est
sans doute un vaste débat. Mais les conséquences, elles, sont claires :
pour au moins 40% de la population française, regarder un film
sous-titré est bel et bien, pour reprendre les termes de M. Analogue,
"vachement dur", pour ne pas dire tout bonnement impossible...

A++
--
Christian
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nospam
analogue wrote:

Que veut dire votre sondage ? Que nous avons 40% d'illétrés ?



Ce n'est pas "mon" sondage et il ne s'agit pas d'illettrés, mais, comme
indiqué, de personnes "ayant des difficultés à lire et à comprendre des
textes de la vie quotidienne" (a fortiori de suivre des sous-titres
défilant à une cadence relativement élevée, tout en regardant les images
du film).

Je n'ai pas plus de précisions sur ces statistiques. Je me souvenais
d'être tombé sur des chiffres analogues il y a quelque temps (j'en étais
d'ailleurs resté baba). A l'occasion de cette discussion, j'ai fait une
recherche rapide sur Google et trouvé cette référence que j'ai postée
(en approfondissant un peu, il est certainement possible de trouver des
chiffres plus précis).

A++
--
Christian
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analogue
Christian Fauchier a écrit :
Ce n'est pas "mon" sondage et il ne s'agit pas d'illettrés, mais, comme
indiqué, de personnes "ayant des difficultés à lire et à comprendre des
textes de la vie quotidienne" (a fortiori de suivre des sous-titres
défilant à une cadence relativement élevée, tout en regardant les images
du film).



Ca explique peut-être le Non dominant contre la constitution =(
Si l'école ne fait pas bien son travail, à ce rythme-la on va finir en
dictature.

--
Laurent Raufaste
analogue @ http://www.glop.org/
Votez OUI !
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Lolo
"Francois Kahn" a écrit

Dernière chose. La limousine qui parcourt Mulholland Drive au début
et à la fin du film n'est pas une Cadillac, en dépit des répliques
des flics. Il s'agit d'une Lincoln, du nom évidemment du président.
Lequel est mort assassiné par un comédien dans un théâtre !



Effectivement, ça éclaire tout le film !!!