Grande secousse dans les politiques environnementales américaines : l’administration Trump, via l’Agence de protection de l’environnement (EPA) dirigée par Lee Zeldin, Républicain nommé à la tête de l'Agence par Donald Trump dès novembre 2024, vient d’annoncer son intention de supprimer la décision scientifique de 2009 – l’endangerment finding – qui servait de socle légal à la régulation des principales émissions de gaz à effet de serre.

Cette initiative, qui résonne comme un coup d’arrêt massif aux politiques antérieures en faveur du climat, suscite d’ores et déjà débats, inquiétudes et réactions passionnées.

Retour en arrière historique sur la régulation des gaz à effet de serre

Ce choix politique initié le 29 juillet 2025 marque un passage à la vitesse supérieure dans la volonté de l’administration Trump de démanteler le cadre fédéral encadrant les émissions de polluants climatiques.

Donald Trump

L’« endangerment finding », outil fondamental issu de la jurisprudence de la Cour Suprême et soutenu par des décennies de recherches scientifiques, affirmait depuis 2009 que le dioxyde de carbone (CO2), le méthane ou encore les hydrofluorocarbures représentent un danger pour la santé publique et le bien-être des générations présentes et futures.

Adossée principalement au Clean Air Act, cette base légale permettait d’imposer des restrictions sur un large spectre d’industries et de secteurs, dont l’automobile et l’énergie.

Pour Lee Zeldin, il s’agit de « tourner la page de la doxa climatique qui pénalise l’économie américaine », en supprimant ce qu’il appelle « le Saint Graal de la religion du changement climatique ».

Mais cette annonce fait écho à d’autres décisions récentes allant dans le sens d’une réduction des normes sur l’air, l’eau ou la pollution industrielle, renforçant la logique globale de dérégulation prônée par la Maison-Blanche.

Dernier point non négligeable : l'endangerment finding avait été mis en place par l'administration Obama. Et l'on sait l'aversion de Donald Trump pour toutes les politiques de protection mises en place par les administrations démocrates, d'Obama à Biden, et son obsession de les faire annuler.

Enjeux économiques et industriels au premier plan

Derrière cette opération juridique, l’administration avance un double objectif : relancer la compétitivité et rendre le marché américain plus attractif pour l’industrie automobile, le secteur de l’énergie fossile et les grandes infrastructures.

Le chef de l’EPA, lors d’un événement organisé dans une concession d’Indiana, n’a pas caché que la révocation de l’endangerment finding constituait à ses yeux « la plus grande opération de déréglementation de l’histoire des États-Unis ».

Vance Trump

Selon ses défenseurs, de telles restrictions auraient coûté des centaines de milliards de dollars à l’économie et réduit le choix des consommateurs. Ils soulignent également que cette remise en cause pourrait alléger significativement la pression juridique sur les entreprises américaines, qui contestent depuis des années l’autorité de l’EPA et la portée des normes environnementales.

Mais ce raisonnement, centré sur des impératifs économiques, entre directement en conflit avec la préoccupation croissante d’une partie de la population face à la multiplication des catastrophes climatiques majeures.

Risque climatique accru et réactions immédiates

Ce virage opéré au sommet de l’État intervient alors que les signaux d’alarme scientifiques sur le réchauffement climatique se multiplient, chaque nouvelle étude insistant sur le lien entre activités humaines et extrêmes météorologiques.

Les experts alertent sur les effets amplificateurs de l’abandon du dispositif fédéral, estimant que la suppression de l’endangerment finding pourrait à terme abolir la majorité des normes limitant les émissions des secteurs clés (automobiles, énergie, industrie lourde).

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Les ONG et de nombreuses personnalités politiques, démocrates comme républicaines, dénoncent quant à elles un passage en force. « Alors que la population subit des inondations dévastatrices et des vagues de chaleur meurtrières, la Maison Blanche essaye de prouver que ces émissions ne sont pas un danger », résume Christy Goldfuss (Natural Resources Defense Council).

Même certains anciens responsables de l’EPA jugent que ce revirement est « contraire à la mission de protection de l’environnement et de la santé des Américains ».

De premières initiatives judiciaires sont d'ailleurs attendues de la part d’associations environnementales, qui entendent vérifier la légalité de la démarche devant les tribunaux.

Pas de quoi inquiéter Donald Trump qui poursuit sa politique climatosceptique et de désengagement des obligations de protection de la nature, marquée par des licenciements, des réductions du budget des agences environnementales et la sortie d'accords internationaux sur la lutte contre le changement climatique.

Moins d’État, plus d’autonomie pour les États fédérés ?

Si la suppression de la base légale fédérale inquiète sur le plan national et international, elle pourrait paradoxalement ouvrir la voie à une montée en puissance de réglementations locales.

Des États comme la Californie, déjà en pointe sur les standards automobiles et la réduction de l’empreinte carbone, affichent leur détermination à poursuivre leur propre feuille de route climatique.

Panneaux solaires

Selon Ann Carlson, responsable de l’Environnement à l’UCLA, « cette décision pourrait in fine renforcer la capacité des États progressistes à instaurer leurs propres réglementations ».

Ce désengagement fédéral pourrait donc donner naissance à une mosaïque d’approches allant du laisser-faire complet à des politiques locales ambitieuses, illustrant les profondes divisions qui traversent la société américaine sur les enjeux de climat.

Vers une bataille juridique et politique de longue haleine

Impossible de prédire aujourd’hui l’issue de ce bras de fer : la procédure de suppression de l’endangerment finding va déclencher une phase de consultations publiques, suivie sans doute de lobbying intensif, de batailles judiciaires, et d’intenses débats politiques.

La validité de cette réforme sera d’autant plus scrutée qu’elle fait suite à une décision de la Cour Suprême (2007) ayant confié justement à l’EPA le pouvoir de régulation sur les gaz à effet de serre.

Dans ce contexte, le paysage réglementaire américain apparaît plus que jamais instable et incertain, oscillant entre offensives fédérales, résistances locales et mobilisation citoyenne.