Les océans, régulateur fragile du climat mondial, viennent d’atteindre un seuil alarmant selon le dernier rapport Planetary Health Check 2025 de l’Institut de recherche sur le climat de Potsdam (PIK).

Pour la première fois, l’acidification des océans franchit la limite définie par la communauté scientifique, mettant en péril non seulement la biodiversité marine mais aussi la stabilité planétaire.

Cette nouvelle barrière dépassée soulève de vives inquiétudes parmi les experts et invite à repenser l’impact de nos activités sur la planète...au moment même où Donald Trump a fait un discours retentissant à l'ONU en réfutant les dangers du changement climatique.

Une limite planétaire franchie : un nouveau signal d’alerte

L’idée des limites planétaires repose sur la définition de seuils physiques à ne pas dépasser pour garantir un « espace de fonctionnement sûr pour l’humanité ». Le rapport 2025 du PIK annonce que la septième limite sur neuf est désormais franchie : l’acidification des océans atteint un niveau incompatible avec la stabilité des écosystèmes marins.

credit : Planetary Health Check

Ce concept, inventé en 2009 par un groupe de scientifiques, sert à mesurer l’empreinte humaine sur la planète et à déterminer si l’on approche dangereusement de la « zone de danger ».

Le rapport rappelle que la majorité des limites planétaires sont aujourd’hui dépassées, comme celles du climat, de l'intégrité de la biosphère ou de la pollution chimique.

Les neuf indicateurs ne sont pas figés et peuvent s'améliorer ou se dégrader au fil du temps. Mais chaque année, les bilans du PIK pointent une tendance à la dégradation, révélant des pressions croissantes sur les océans et les terres.

« L’océan est en train de s’acidifier, menaçant la vie marine et nous faisant entrer dans des conditions dangereuses, avec une tendance qui s’empire encore », alertent les chercheurs .

Qu’est-ce que l’acidification des océans et pourquoi s’inquiéter ?

L’acidification des océans provient essentiellement de l’absorption du dioxyde de carbone (CO2) rejeté par la combustion des énergies fossiles. Ce phénomène abaisse le pH de l’eau, transformant les océans en milieux de plus en plus acides.

Seules l"amélioration de la couche d'ozone et des émissions d'aérosols
restent dans le vert (credit : PIK / Planetary Health Check)

Selon les scientifiques, « le pH à la surface des océans a déjà baissé d’environ 0,1 depuis le début de l’ère industrielle. C’est l’équivalent d’une hausse de 30 à 40% de l’acidité ». En conséquence, des minéraux essentiels comme l’aragonite se désagrègent, fragilisant les coraux et de nombreux organismes à coque.

Cette acidification met en péril la capacité des océans à absorber le CO2, risquant d’aggraver le réchauffement climatique et de perturber la chaîne alimentaire marine. Les coraux, les mollusques, des espèces cruciales du plancton et même des requins voient leurs conditions de vie menacées, ce qui peut entraîner la disparition progressive de ces organismes et affecter durablement les équilibres marins et humains.

Les conséquences pour la vie marine et l’humanité

La fragilisation des écosystèmes marins n’est pas une simple problématique environnementale : il s’agit d’un risque direct pour la stabilité planétaire.

La perturbation de la chaîne alimentaire commence par la disparition des organismes formant des coques en carbonate de calcium. Dans le même temps, les vagues de chaleur marines et la baisse d’oxygène accentuent la pression sur la faune océanique.

« Sans mers en bonne santé, pas de planète en bonne santé », résume Sylvia Earle, océanographe. Ce changement pèse sur la ressource en produits de la mer, leur qualité nutritionnelle et expose l’humanité à des risques croissants. Les impacts  concernent aussi l’économie, la sécurité alimentaire, et la régulation climatique globale.

Des précédents et des solutions : la fenêtre de guérison

Face à cette situation, l’histoire de la couche d’ozone, l’une des deux limites non franchies et améliorées dans le temps, laisse entrevoir des pistes d’action. Depuis l’interdiction de substances nocives, cette couche se régénère progressivement.

Les émissions mondiales d’aérosols ont également diminué. Selon les experts du PIK, « la fenêtre de guérison reste ouverte » et l'échec n'est pas inévitable. Il existerait donc encore des leviers d'action pour faire revenir au moins certaines limites planétaires dans le vert.

La solution est simple sur le papier : réduire les émissions de gaz à effet de serre, stopper la déforestation, et adopter un changement de cap politique à l’échelle internationale. Les tendances de dégradation environnementale peuvent s’inverser si la mobilisation est à la hauteur.

Le bilan annuel du PIK rappelle que chaque seuil franchi est aussi un appel à l’action. Cette dernière peine toutefois à se concrétiser du fait du manque d'entrain général à appliquer les mesures décidées lors des grands événements internationaux comme les COP.

Elle rencontre désormais des obstacles de principe avec le climatoscepticisme de Donald Trump qui fait sortir les Etats-Unis des grands accords sur le climat et réactive les énergies fossiles.