Après six mois d'auditions et un travail d'enquête approfondi, le verdict de la commission parlementaire sur TikTok a été rendu public ce jeudi 11 septembre. Le constat est sans appel : la plateforme est qualifiée de « pire des réseaux sociaux à l'assaut de notre jeunesse » et d'« océan de trash ». Les députés estiment que le réseau social expose en toute connaissance de cause les mineurs à des contenus addictifs et dangereux, nuisant à leur santé mentale. Pour y remédier, le rapport avance une série de propositions radicales.

Un constat alarmant sur la santé mentale des jeunes

Le document de près de 300 pages, rédigé par les députés Laure Miller et Arthur Delaporte, dresse un bilan sévère. L'algorithme de TikTok, conçu pour capter l'attention à tout prix, enfermerait les jeunes dans des spirales de contenus néfastes (suicide, automutilation, désinformation). La rapporteure Laure Miller dénonce une plateforme qui fonctionne comme une « espèce de roulette russe », au détriment du bien-être des adolescents. Les auditions des responsables de TikTok ont révélé un « déni entretenu » face à ces problèmes, tandis que celles de certains influenceurs ont confirmé leur « cynisme et leur dangerosité ».

Le couvre-feu numérique et l'interdiction, mesures phares

Pour "sortir les enfants du piège TikTok", la commission formule 43 recommandations. Les deux mesures les plus drastiques visent directement à limiter l'accès aux plateformes :

  • Une interdiction de tous les réseaux sociaux (hors messageries) pour les jeunes de moins de 15 ans.

  • Un couvre-feu numérique pour les adolescents de 15 à 18 ans, qui bloquerait l'accès aux réseaux sociaux entre 22 heures et 8 heures du matin.

Le rapport envisage même une interdiction totale pour l'ensemble des mineurs d'ici 2028 si les plateformes ne respectent pas leurs obligations légales de manière satisfaisante.

Au-delà de TikTok, une régulation pour tous et des parents ciblés

Les préconisations ne visent pas uniquement l'application chinoise mais l'ensemble des réseaux sociaux. La commission souhaite également agir sur d'autres fronts. Elle propose d'interdire l'usage du téléphone portable dans les lycées et de repenser l'utilisation du numérique à l'école. De manière plus controversée, le rapport suggère la création future d'un « délit de négligence numérique ». Cette mesure viserait à punir les « manquements graves des parents » en matière de contrôle du temps d'écran, avec des peines pouvant aller jusqu'à deux ans de prison et 30 000 euros d'amende.

Crédits : Johnny Cohen / Unsplash

Un parcours semé d'embûches juridiques et techniques

La mise en place de ces mesures fait face à des obstacles de taille. Une loi française sur la majorité numérique, votée en 2023, n'a jamais été appliquée en raison de doutes sur sa conformité avec le droit européen. Les nouvelles propositions risquent de se heurter au même problème. La commission appelle donc à « maintenir la pression » sur l'Europe pour permettre de telles régulations nationales. De son côté, TikTok a réagi en se disant en « désaccord avec les conclusions », affirmant que les enjeux concernent tout le secteur et que la plateforme a déjà mis en place des mesures de protection pour les jeunes.